Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/386

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L’un des soirs suivants, vers les neuf heures, étant seul dans le laboratoire, l’ingénieur, en parcourant, assis auprès d’une lampe, l’une des principales gazettes américaines, tomba sur les lignes suivantes qui attirèrent son attention et qu’il lut deux fois avec une profonde stupeur :

Lloyd. ― Dispatch. Nouvelles maritimes.

« La perte du steamer The Wonderful, que nous avons annoncée hier, vient de se confirmer et nous recevons, sur ce sinistre, les tristes détails suivants :

« Le feu s’est déclaré à l’arrière, sur les deux heures du matin, dans les compartiments des marchandises où des barils d’essence minérale et de spiritueux, enflammés par une cause inconnue, ont éclaté.

« La mer était grosse et, comme le steamer tanguait assez durement, la nappe de flamme, en un instant, pénétra dans le compartiment des bagages. Un fort vent d’ouest activa l’incendie de telle sorte que l’embrasement apparut en même temps que la fumée.

« En une minute, les trois cents passagers, éveillés en sursaut, encombraient le pont, éperdus devant l’inévitable péril.

« Là, des scènes horribles se passèrent.

« Devant la fournaise qui crépitait et s’avançait, les femmes, les enfants poussaient de grands et désespérés cris d’épouvante.

« Le capitaine ayant déclaré que l’on sombrerait