Page:Villiers de L'Isle-Adam - Nouveaux Contes cruels.djvu/181

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Causons du vôtre. Maniez-moi, désormais, de l’or et non des mots. Plus de Beau idéal, plus d’Art, plus d’âme, plus de fumisteries ! — ou gare le grabat, la voirie, et les bonnes d’enfants sous votre bronze.

» Dès demain, louez-moi, dans Paris, un bureau, trois chaises, un fauteuil, deux bancs pour l’antichambre, un domestique en livrée neutre et sévère, et que sur votre porte soit clouée une large plaque de cuivre avec ce mot : banquier. Ce titre est d’un si intrinsèque prestige, il est à ce point magique, voyez-vous, que si tel mendiant, tel famélique loqueteux, osait l’inscrire au fronton de son échoppe, le passant, qui viendrait de lui jeter deux sous, lui confierait peut-être sa fortune. La leçon subie d’une faillite de quinze cents millions confiés au premier venu, n’est-elle pas oubliée déjà ? Les deux milliards qui viennent de s’évaporer entre les deux Amériques ont-il appris quelque chose ? Rien. Rien. Rien.