Page:Villiers de L'Isle-Adam - Nouveaux Contes cruels.djvu/60

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Et, faisant feu de nouveau, il abattit, à cent pas de lui, d’une balle sans doute, le superbe basset qu’il venait d’accuser.

À ce spectacle inattendu, Sylvabel tressaillit.

— Comment ! vous tuez ce chien, le rendant coupable de votre maladresse ? s’écria-t-elle, un peu saisie.

— Et je le regrette, car je l’aimais beaucoup ! répondit tranquillement Gabriel. Mais je suis ainsi fait que je ne puis supporter sans un mouvement parfois violent, une contrariété ; soldat, je serais fusillé, je le sens, dans les vingt-quatre heures. C’est un défaut qui rendit mon enfance batailleuse — et dont j’ai voulu, jusqu’à ce jour en vain, me corriger. J’essayerai de nouveau, cependant, pour vous plaire.

Sylvabel, serrant sa cravache, se tut, un peu songeuse.

Et l’on repartit. Entre temps, Gabriel parla de toutes autres choses que de l’incident… oublié. Ses paroles furent légères et rares.