Page:Villiers de L’Isle-Adam - Axël, 1890.djvu/193

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Des bords de mon fossé jusqu’aux lisières les plus reculées, villages et hameaux se commandent ; — à peine cinq jours suffiraient pour que tous, à la fois, fussent au courant d’un ordre émis de cette muraille, — d’un avis, plutôt ! car, pour peu que l’on soit aimé, un avis revient à mieux qu’un ordre, et, dans ces bois, les cœurs sont redevenus à ce point sauvages que vous-même n’y trouveriez pas un traître. Qu’importerait, d’ailleurs ! Toute survenue, vers moi, d’un ou de plusieurs, m’est bientôt signalée : — selon le nombre, l’on se prémunit et l’on se tient sur ses gardes, à toutes approches. Une fois entré dans les successives étendues de la Forêt, comment vivre, s’orienter, s’abriter de nuit, avancer enfin, sans être aperçu ? Démuni de mon secours direct, — seriez-vous arrivé jusqu’à moi ? Non. Plusieurs jours avant votre présence ici, le vent m’avait appris, en effet, que deux cavaliers… S’arrêtant soudain et le regardant de ses yeux clairs : et, même, une — femme…

Un instant de silence : — puis, à lui-même — et comme ayant, définitivement, statué sur un doute, à la vue de l’impassibilité attentive du Commandeur :


— (Ils ne se connaissent pas).

Reprenant, avec froideur, la phrase interrompue :


… cheminaient vers ma demeure. Ils étaient suivis,