Page:Villiers de L’Isle-Adam - Axël, 1890.djvu/233

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délivrer ! ne t’amoindris pas en t’asservissant aux sens d’esclave par lesquels il t’enserre et t’enchaîne. Puisque tu ne sortiras pas de l’illusion que tu te feras de l’univers, choisis la plus divine. Ne perds pas le temps à tressaillir, ni à somnoler dans une indolence incrédule ou indécise, ni à disputer avec le langage changeant de la poudre et de la vermine. Tu es ton futur créateur. Tu es un Dieu qui ne feint d’oublier sa toute-essence qu’afin d’en réaliser le rayonnement. Ce que tu nommes l’univers n’est que le résultat de cette feintise dont tu contiens le secret. Reconnais-toi ! Profère-toi dans l’Être ! Extrais-toi de la geôle du monde, enfant des prisonniers. Évade-toi du Devenir ! Ta « Vérité » sera ce que tu l’auras conçue : son essence n’est-elle pas infinie, comme toi ! Ose donc l’enfanter la plus radieuse, c’est-à-dire la choisir telle… car elle aura, déjà, précédé de son être tes pensées, devant s’y appeler sous cette forme où tu l’y reconnaîtras !… — Conclus, enfin, qu’il est difficile de redevenir un Dieu — et passe outre : car cette pensée, même, si tu t’y arrêtes, devient inférieure : elle contient une hésitation stérile.

Ceci est la Loi de l’Espérable : c’est l’évidence unique, attestée par notre infini intérieur. Le devoir est donc d’essayer, si l’on est appelé par