Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/157

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partagée par un inconnu, dont la belle mine, d’ailleurs, (il ne sut pourquoi !) le froissa tout d’abord au lieu d’éveiller sa sympathie, fit que l’ingénieur se raffermissant soudain sur ses pieds et haussant les sourcils, essuya ses paupières — devenues brusquement moins humides.

— Sans doute, quelque parent, dont Victurnienne aura oublié de me parler ! pensa-t-il.

Au bout de quelques pas, et comme les gémissements du jeune « parent » ne discontinuaient point, à l’encontre de ceux du mari qui s’étaient calmés comme par enchantement :

— N’importe ! Il est singulier que je ne l’aie jamais vu chez nous !… murmura celui-ci, les dents un peu serrées.

Et, s’approchant du bel inconnu :

— Monsieur n’est-il pas un cousin de… de la défunte ? demanda-t-il tout bas.

— Hélas ? monsieur, — plus qu’un frère ! balbutia l’adolescent, dont les grands yeux bleus étaient fixes.

Nous nous aimions tant ! Quel charme ! Quel abandon ! Quelle grâce ! Et quel cœur fidèle !… Ah ! sans ce triste mariage de raison, qui nous a… — Mais que dis-je ! Mes idées sont tellement troublées…

— Le mari, c’est moi, monsieur : qui êtes-vous ? articula, sans cesser d’assourdir sa voix, mais devenu graduellement blême, M. Romain.

Ces simples mots parurent produire un effet voltaïque sur le blond survenu. Il se redressa, très