Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/353

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arrière, au pouce du pied opposé. On lui ajustait alors cette cage autour de la tête, et, l’ayant fixée aux épaules, on la refermait après y avoir introduit deux grands rats affamés. Le bourreau imprimait ensuite, au condamné, un balancement. Puis il se retirait, le laissant dans les ténèbres et ne devant revenir le visiter que le surlendemain.

À cet aspect, dont l’horreur impressionnait, d’ordinaire, les plus résolus :

— Tu oublies que nul ne doit m’entendre, hors toi ! dit froidement Tsë-i-la.

Les battants se refermèrent.

— Ton secret ? gronda Tchë-Tang.

— Mon secret, tyran ! — C’est que ma mort entraînerait la tienne, ce soir ! dit Tsë-i-la, l’éclair du génie dans les yeux. — Ma mort ? Mais, c’est elle seule, ne le comprends-tu pas, qu’espèrent, là-haut, ceux qui attendent ton retour en frémissant !… Ne serait-elle pas l’aveu de la nullité de mes promesses ?… Quelle joie pour eux de rire tout bas, en leurs cœurs meurtriers, de ta crédulité déçue ? Comment ne serait-elle pas le signal de ta perte ?… Assurés de l’impunité, furieux de leur angoisse, comment, devant toi, diminué de l’espoir avorté, leur haine hésiterait-elle encore ?… Appelle tes bourreaux ! Je serai vengé. Mais je le vois : déjà tu sens bien que si tu me fais périr, ta vie n’est plus qu’une question d’heures ; et que tes enfants égorgés, selon l’usage, te suivront ; — et que Li-tien-Së, ta fille, fleur de délices, deviendra la proie de tes assassins.