Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/355

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reste dépend de toi. J’ai tenu parole ! — Va, je n’ai précisé les liangs d’or et la dignité que je dédaigne que pour laisser mesurer à la munificence du prix arraché à ta duplicité célèbre, l’épouvantable importance de mon imaginaire secret.

« Roi Tchë-Tang, moi, Tsë-i-la, qui, attaché, par tes ordres à ce poteau, exalte, devant la Mort terrible, la gloire de l’auguste Li-taï-pé, mon maître, aux pensées de lumière, — je te déclare, en vérité, voici ce que te dicte la sagesse. — Rentrons le front haut, te dis-je, et radieux ! Fais grâce, d’un cœur sous l’impression du Ciel ! Menace d’être à l’avenir sans miséricorde. Ordonne des fêtes illuminées, pour la joie des peuples, en l’honneur de Fô (qui m’inspira cette ruse divine !) — Moi, demain je disparaîtrai. J’irai vivre, avec l’élue de mon amour, dans quelque province heureuse et lointaine, grâce aux salutaires liangs d’or. — Le bouton de diamant des mandarins — que tout à l’heure je recevrai de ta largesse, avec tant de semblants d’orgueil, — je présume que je ne le porterai jamais ; j’ai d’autres ambitions : je crois seulement aux pensées harmonieuses et profondes, qui survivent aux princes et aux royaumes ; étant roi dans leur immortel empire, je n’ai que faire d’être prince dans les vôtres. Tu as éprouvé que les dieux m’ont donné la solidité du cœur et l’intelligence égale à celle, n’est-ce pas, de ton entourage ? Je puis donc, mieux que l’un de tes grands, mettre la joie dans les yeux d’une jeune femme. Interroge Li-tien-Së, mon rêve ! Je suis sûr qu’en voyant