Page:Viollet-Leduc - Bibliographie des chansons, fabliaux, 1859.djvu/21

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Que de bonnes leçons les grands de la Rome papale ne reçurent-ils pas par l’intermédiaire burlesque des statues tronqnées de Marforio et de Pasquino ? Que de chansons aux refrains comiques sont allées frapper utilement les oreilles des seigneurs et des princes de la France féodale ? À trois siècles à peine de notre époque, ne voyons-nous pas l’hilarité française flageller sans cesse les héros de la Ligue, ces chefs fougueux de la sanglante mêlée de passions politiques et religieuses où s’abîma la royale maison de Valois ? Après les coups fourrés du Gargantua et du Pantagruel adressés à toutes les sottises sociales sans grâce ni merci, tombèrent drus comme grêle les petits vers et les grosses moqueries, accompagnés de l’artillerie formidable dont les pièces se nommaient : Satyre Ménippée, Confession de Sancy Divorce satyrique, Réveille-Matin des François, Baron de Fœneste, et tant d’autres couleuvrines bourrées jusqu’à la gueule, auxquelles la marotte de fous intrépides savait si adroitement mettre le feu.

Eh bien ! ce sont les produits de cette humeur originale, de cette piquante tournure d’esprit particulière aux peuples d’origine latine que Viollet-Leduc a réuni dans ce Recueil critique, qui est plutôt un livre plein de précieux documents littéraires qu’un simple catalogue. Tous ces francs rieurs, tous ces libres et joyeux penseurs, tous ces écrivains hardiment prime-sautiers, qui ont conservé parmi nous le privilège de dérider sans fin les générations, sont rassemblés dans ce précieux volume.

C’est une véritable salle de portraits, où, présentés et expliqués par l’auteur, viennent encore rire entre eux et avec les lecteurs modernes, ces fantaisistes charmants, dont la patrie était jadis bornée au nord par la Manche, à l’est par le Rhin et l’Adriatique, au sud par la gracieuse Méditerranée, qui voit fleurir citronnier sur ses rivages aimés du soleil. Une chose à remarquer, c’est que si, dans la surprise inévitable d’une grande réception, il a pu s’y glisser un personnage portant un nom à syllabes germaniques, le pauvre intrus se trouve ici contraint, mal à l’aise et tout à fait dépaysé.

En choisissant ainsi une catégorie spéciale d’ouvrages, en