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entendait continuer à donner à ses gros points d’appui une saillie, et par conséquent une force plus grande que celle laissée après l’abandon des premiers projets.


Il y a donc lieu d’admettre que Robert de Coucy éleva la cathédrale de Reims jusqu’à la hauteur des corniches des chapelles du chœur et bas-côtés, sauf les quatre premières travées de la nef, qu’il ne commença même pas ; qu’après lui, la construction fut continuée en faisant subir des changements aux projets primitifs afin de réduire les dépenses ; que cette nécessité de terminer l’édifice à moins de frais était le résultat d’une diminution dans les dons faits par les populations. L’ornementation des parties inférieures du chœur et des transsepts de la cathédrale de Reims, jusques et y compris la corniche des chapelles rayonnantes, porte encore le cachet de la sculpture de la fin du XIIe siècle ; tandis qu’immédiatement au-dessus du niveau des corniches de ces chapelles apparaît une ornementation qui a tous les caractères de celle du milieu du XIIIe siècle. Dans la travée de droite du pignon du transsept nord, est percée une porte donnant aujourd’hui dans la petite sacristie établie entre les contreforts ; cette porte, dont les sculptures sont peintes, date évidemment des premières constructions commencées par Robert de Coucy, et les bas-reliefs pourraient même être attribués à l’école des sculpteurs de la fin du XIIe siècle. Les parties inférieures du pignon du transsept sud, qui ne furent pas modifiées par l’ouverture de portes, affectent une sévérité de style qui ne le cède en rien aux constructions inférieures de la façade de Notre-Dame de Paris. Tout, enfin, dans le rez-de-chaussée de la cathédrale de Reims, du chœur à la moitié de la nef, dénote l’œuvre d’un artiste appartenant à l’école laïque d’architectes née à la fin du XIIe siècle. Au-dessus, le style ogival a pris son entier développement, mais la transition entre les deux caractères architectoniques est habilement ménagée. Nous ne savons en quelle année Robert de Coucy cessa de travailler à la cathédrale ; cependant lui-même, en construisant, modifia probablement quelques détails de son projet primitif. Cet architecte n’en était pas à son coup d’essai lorsqu’il commença l’œuvre en 1212, et peut-être était il déjà d’un âge assez avancé ; toutefois (et les notes de Villart de Honnecourt sont là pour le prouver) il cherchait sans cesse, comme tous ses contemporains, des