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En construisant la Sainte-Chapelle de Paris, Pierre de Montereau se rapprocha davantage du système des chaînages modernes. Au niveau du dessous des appuis des fenêtres de la chapelle haute, à la naissance des voûtes et au-dessous de la corniche supérieure, il posa une suite de crampons de 0,30 c. à 0,50 c. de longueur, qui, au lieu d’être scellés dans chaque morceau de pierre, vinrent s’agrafer les uns dans les autres, conformément à la fig. 6.

Cette chaîne, posée dans une rigole taillée dans le lit de l’assise, fut coulée en plomb. Le chaînage, au niveau de la naissance de la voûte, se reliait, à chaque travée, à une forte barre de fer de 0,05 c. d’équarrissage, passant au-dessus des chapiteaux des meneaux à travers ceux-ci et faisant ainsi partie de l’armature des vitraux. À mi-hauteur des fenêtres, il existe des barres semblables, qui sont reliées entre elles dans l’épaisseur des piles. Ce système de chaînage était certainement moins dangereux que celui employé au sommet du chœur de la cathédrale de Paris ; cependant il eut encore, malgré la masse de plomb dont il est enveloppé, l’inconvénient de faire casser un grand nombre de pierres. Pour donner une idée de la puissance du gonflement du fer, lorsqu’il passe à l’état d’oxyde ou de carbonate de fer, nous ferons observer que le chaînage placé au-dessous des appuis des grandes fenêtres de la Sainte-Chapelle, en gonflant, souleva les assises composant ces appuis et les meneaux qu’elles supportent, au point de faire boucler ces meneaux et de les briser sur quelques points, bien qu’ils soient d’une grande force.

Au XIIIe siècle, le fer ne se travaillait qu’à la main, et on ne possédait pas des forges comme celles d’aujourd’hui, qui fournissent des fers passés au cylindre, égaux et d’une grande longueur. Pierre de Montereau eût pu cependant chaîner la Sainte-Chapelle au moyen de pièces de fer d’une plus grande longueur que celles indiquées dans la fig. 6, puisque, dans le vide des fenêtres, les traverses se reliant aux chaînages ont plus de quatre mètres de long ; mais il faut croire qu’alors la difficulté de faire forger des fers de cette longueur et d’une forte épaisseur était telle qu’on évitait d’en employer, à moins de nécessité absolue.

Au XIVe siècle, on voit déjà de longs morceaux de chaînes en fer posés