Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 2.djvu/498

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
[cha]
— 495 —

taire, de Chamaillères, de Notre-Dame du Port a Clermont (13), qui datent du XIe siècle ; nous les rencontrons encore au Mas-d’Agenais, sur les bords de la Garonne, à Saint-Sernin de Toulouse, à la cathédrale d’Agen, et jusqu’à Saint-Papoul sur les frontières du Roussillon. La corniche n’est, dans ce cas, qu’une simple tablette destinée à recevoir les premières dalles de la couverture et à protéger les murs par sa saillie. On sent encore l’influence antique dans le chapiteau (fig. 13) d’une des chapelles de Notre-Dame du Port ; mais ces réminiscences sont peu communes, et les chapiteaux appartenant à ce style et à l’architecture des XIe et XIIe siècles de ces provinces, ont un caractère original.

Pour rencontrer des chapiteaux dans la composition desquels les traditions gallo-romaines ont une grande influence jusqu’au commencement du XIIIe siècle, il faut aller dans certaines localités de l’Est et du Sud-Est, à Autun, à Langres, le long de la Saône et du Rhône. Les chapiteaux des colonnes monocylindriques du sanctuaire de la cathédrale de Langres, qui datent de la seconde moitié du XIIe siècle, sont évidemment imités de chapiteaux corinthiens gallo-romains ; on y retrouve même le faire de la sculpture, les trous nombreux de trépan percés pour dessiner les séparations des membres des feuilles, la découpure dentelée des feuillages, les volutes, culots et retroussis, le tailloir curviligne avec ses quatre fleurons et la corbeille corinthienne. Souvent, à côté de ces chapiteaux imités de l’antiquité, le goût particulier à l’époque apparaît, et les feuillages corinthiens sont remplacés par des figures, comme à la cathédrale d’Autun, par des entrelacs ou des rosaces, genre d’ornement fréquemment adapté aux chapiteaux pendant le XIIe siècle, ainsi que le fait voir la fig. 14, reproduisant un chapiteau de l’ancien cloître roman de l’abbaye de Vézelay[1]. Il faut reconnaître que, même dans les contrées où la tradition gallo-romaine persiste, à cause surtout du voisinage de fragments antiques qui couvraient encore le sol, cette influence n’a d’effet que sur les chapiteaux posés sur des colonnes monocylindriques comme les colonnes antiques, et sur des pilastres disposés comme le sont les pilastres antiques. Sur les colonnes engagées, d’angles, et les colonnettes, le chapiteau roman prend sa place, comme si ces genres de supports appartenaient exclusivement à ce style et ne pouvait admettre de mélanges. Cela est bien visible dans la cathédrale de Langres.

Ce monument ne présente à l’intérieur et à l’extérieur que les colonnes monocylindriques du chœur, dont nous avons parlé tout à l’heure, et des pilastres. Les chapiteaux de ces colonnes et pilastres rappellent avec plus ou moins de fidélité la sculpture et la composition des chapiteaux corinthiens romains. Mais le triforium du chœur présente une suite d’arcatures supportées par des colonnettes accouplées. Ces colonnettes sont surmontées de chapiteaux jumeaux portant les sommiers des

  1. Ce chapiteau est le seul de ce cloître qui soit conservé intact ; il est déposé dans le musée de l’église, et reproduit dans la nouvelle construction du cloître.