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[construction]
[civile]
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sa galerie de service C, au-dessus de laquelle s’ouvrent des jours éclairant les salles ; en B, l’étage supérieur, presque toujours lambrissé, éclairé par des fenêtres surmontées de lucarnes du côté opposé à la galerie et par des lucarnes seulement au-dessus de cette galerie. Le couloir de l’étage supérieur est porté sur des arcs qui permettent, entre leurs pieds-droits, l’ouverture des jours éclairant directement le premier étage. Une disposition de ce genre existe encore au Palais-de-Justice de Paris, dans la partie occidentale ; elle date du XIIIe siècle. On ne peut méconnaître ce qu’il y a de raisonnable, de vrai, dans une pareille construction, qui donne à chaque service son importance relative, qui laisse aux pièces principales tout l’air et la lumière dont elles ont besoin, et qui accuse bien franchement, à l’extérieur, les services et les distributions intérieures du bâtiment. Cela est certainement plus conforme aux bonnes traditions antiques que ne l’est une suite de colonnes ou de pilastres plaqués, on ne sait pourquoi, contre un mur. C’est qu’en effet l’architecture religieuse du moyen âge, qui s’écarta des formes antiques, en sut longtemps conserver l’esprit dans l’architecture civile. Nous allons en fournir plus d’une preuve.

Lorsque les habitations sont vastes et les bâtiments composés de plusieurs étages, ce dont les architectes du moyen âge ne se faisaient pas faute, par cette raison simple que deux étages l’un sur l’autre coûtent moins à bâtir que si l’on couvre une superficie égale à celle de ces deux étages à rez-de-chaussée, puisque alors il faut doubler les fondations et les combles ; si, disons-nous, les bâtiments contiennent plusieurs étages, l’architecte multiplie les escaliers de façon que chaque appartement ait le sien. Cependant il y a toujours un degré principal, un escalier d’honneur qui conduit aux pièces destinées aux réceptions. Pendant la période romane, les degrés de pierre de taille sont assez rares ; on les faisait, le plus souvent, en charpente, c’est-à-dire en superposant des tronçons de poutres équarris, des billes de bois quelque peu engagées dans les murs latéraux. Alors les escaliers se composaient de deux rampes droites avec paliers, et se trouvaient compris dans une cage barlongue longitudinalement traversée par un mur de refend (voy. Escalier). Cette méthode fut presque entièrement abandonnée par les constructeurs du XIIIe siècle, qui adoptèrent les escaliers à vis avec noyau et emmarchements de pierre, comme tenant moins de place et desservant plus aisément les divers étages auxquels il fallait arriver. Si ces escaliers à vis étaient d’un très-petit diamètre, c’est-à-dire de cinq pieds dans œuvre, ils étaient souvent noyés dans l’épaisseur des murs formant une saillie peu prononcée à l’extérieur plutôt qu’à l’intérieur ; si, au contraire, ils occupaient une cage cylindrique ou polygonale d’un assez grand diamètre dans œuvre (huit ou dix pieds), ils formaient complètement saillie à l’extérieur et ne gênaient pas les distributions intérieures. Quant aux corps de logis, ils possédaient chacun leur comble particulier, et si les bâtiments étaient doubles en profondeur, il y avait un comble sur chacun d’eux avec