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voit une autre pièce de cuivre de 2m,00 de longueur ; elle date de 1444 et porte un écu aux armes de Bourgogne. Pendant le XVe siècle, on fabriquait des bouches à feu de dimensions très-variables, depuis le fauconneau, qui ne portait qu’une livre de balle, jusqu’à la bombarde, qui envoyait des projectiles en pierre de deux cents livres et plus[1]. Ces bombardes n’étaient guère longues en proportion de leur diamètre et remplissaient à peu près l’office de mortiers envoyant le projectile à toute volée : elles se chargeaient par la gueule. On se servait aussi de projectiles creux que l’on remplissait de matières détonnantes, de feu grégeois, et c’est une erreur de croire que les bombes sont une invention des dernières années du XVIe siècle, car plusieurs traités de la fin du XVe et du commencement du XVIe[2] nous montrent de véritables bombes faites de deux hémisphères de fer battu réunis par des brides ou des frettes (23). À la fin du XVe siècle, les bouches à feu se classent par natures, en raison du diamètre des projectiles ; il y a les basilics, qui sont les plus grosses ; les bombardes, les ribaudequins, les canons, les dragons volants, scorpions, coulevrines, pierriers, syrènes, passe-murs, passe-avants, serpentines. Sous Charles VII, l’armée royale possédait déjà une nombreuse artillerie, et Charles VIII, en 1494, entra en Italie faisant traîner plus de cent quarante bouches à feu de bronze montées sur affûts à roues, traînées par des attelages de chevaux, et bien servies[3]. Les Italiens, alors, ne possédaient que des canons de fer traînés par des bœufs, et si mal servis qu’à peine pouvaient-ils tirer un coup en une heure.

Examinons maintenant les canons à boîtes encastrées.

L’idée de charger les canons par la culasse était la première qui s’était présentée, comme ce sera probablement le dernier perfectionnement apporté dans la fabrication des bouches à feu. On dut renoncer aux premières boîtes, qui s’adaptaient mal, laissaient passer les gaz, envoyaient parfois une grande partie de la charge sur les servants et se détraquaient promptement par l’effet du recul. On se contenta de faire dans la culasse

  1. Il existe encore dans beaucoup de villes anciennes, et notamment à Amiens, des boulets de pierre, bedaines, qui ont jusqu’à 0,60 c. de diamètre, et qui pèsent jusqu’à 125 kil. et plus. Ces boulets sont parfaitement sphériques, taillés avec soin dans un grès dur.
  2. Voy. Rob. Valturius, de Re militari, pl. de 1483, édit. de Paris, 1534, lib. X, p. 267 ; et le Flave Végèce, Frontin, etc., trad. franç. de 1536, p. 116. Paris, imp. de Chrestian Wechel.
  3. Guichardin, Commines, Paul Jove.