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ter l’un ou l’autre de ces arcs suivant les besoins de la construction. La fenêtre inférieure est fermée par un arc brisé, parce que cette fenêtre est plus large que l’autre, et que le constructeur a voulu donner plus de solidité à sa construction en faisant porter les pieds-droits de la fenêtre supérieure sur les reins d’un arc dont les coupes se rapprocheraient davantage de la ligne horizontale. Il a été évidemment préoccupé de l’effet qu’eût pu produire un jambage de fenêtre sur les claveaux d’un plein cintre entre les sommiers et la clef ; l’arc brisé n’est qu’un moyen de parer au danger d’une rupture vers la partie moyenne de l’archivolte à droite et à gauche. Ne perdons pas de vue ceci : c’est que, vers le milieu du XIIe siècle, les architectes avaient vu tomber un si grand nombre d’édifices romans, surtout au moment où on avait prétendu leur donner de très-grandes dimensions, qu’ils avaient dû observer les effets de tassements et de rupture qui s’étaient produits dans les constructions, et qu’ils redoutaient sans cesse de voir se reproduire ces fâcheux effets. L’arc brisé leur paraissait un moyen excellent d’éviter des désastres ; ils s’en servaient donc comme on se sert d’un nouveau procédé reconnu bon, c’est-à-dire toutefois qu’ils avaient un doute sur l’efficacité des vieilles méthodes. Il ne pouvait être donné qu’à des hommes déjà expérimentés, hardis, et sûrs de leurs moyens d’exécution, de se servir encore du plein cintre pour d’assez grandes portées, comme le fit l’architecte de Notre-Dame de Chartres.

Avec la pierre de Berchère on pouvait combiner un système de claires-voies mixte tel que celui qui fut adopté pour les fenêtres hautes de la cathédrale de Chartres, c’est-à-dire composé de claveaux formant une ossature élastique et résistante, et de dalles minces percées à jour comme les fermetures de baies antiques ; mais tous les matériaux ne se prêtaient pas à l’emploi de ces procédés. En Champagne, bien que les constructeurs possédassent des matériaux de grandes dimensions, ils ne trouvaient pas, dans les carrières du pays, des bancs d’une résistance assez forte pour se permettre l’emploi de ces larges claires-voies composées de dalles de champ. Ils procédèrent autrement et firent des châssis de pierre, pour maintenir les panneaux des vitraux, au moyen d’arcs appareillés, bandés l’un dans l’autre et indépendants. Ce système apparaît complet dans la structure de fenêtres des chapelles du chœur de la cathédrale de Reims, qui ont dû être élevées vers 1215. Conformément à la méthode champenoise, les fenêtres présentent des berceaux d’arcs brisés, de larges ébrasements se terminant à l’intérieur en façon de formeret pour recevoir les remplissages des voûtes, et portant à l’extérieur un profil saillant sous lequel s’engagent deux arcs brisés et une rose reposant seulement sur ces deux arcs sans pénétrer dans les moulures de l’archivolte. Une figure est nécessaire pour expliquer cette structure très-importante en ce qu’elle nous donne la transition entre les claires-voies bâties et les claires-voies châssis. Nous donnons donc (17) un tracé perspectif de la partie supérieure de ces fenêtres pris de l’intérieur des chapelles. On voit