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ajours inférieurs. Les volets étaient ferrés après le montant de la croisée sur des gonds rivés extérieurement sur de petites plaques de tôle. Ces châssis ne portaient pas de jet d’eau ; l’eau de pluie qui glissait le long de leur parement extérieur était recueillie dans une petite rigole ménagée dans l’appui et s’écoulant au dehors. Enfin les volets étaient maintenus fermés au moyen de targettes entrant dans des gâches ménagées sur les renforts intérieurs du meneau de pierre et, au besoin, par des barres.

Pour poser ces châssis, il n’y avait donc aucune entaille ni scellement à faire après coup dans les tableaux et feuillures ou ébrasements ; l’objet arrivait à sa place complet, achevé à l’atelier, sans qu’il fût nécessaire, comme cela se pratique aujourd’hui dans nos constructions, d’envoyer successivement des ouvriers de deux ou trois états pour terminer la pose et la ferrure d’une croisée. La maçonnerie, la charpente, la menuiserie et la serrurerie étaient achevées simultanément et, les toits couverts, il n’y avait plus qu’à peindre et à tapisser. Quand les châssis de croisée ne roulaient pas, comme ceux-ci, au moyen de tourillons, quand ils étaient attachés après coup, les gonds qui les suspendaient se scellaient dans les lits d’assises pendant la construction, afin d’éviter les entailles et les trous de scellement qui déshonorent les ravalements de nos maisons et de nos palais.

Les châssis de croisée, dans les maisons du XIVe siècle, étaient souvent plus simples que ceux-ci et se composaient seulement de montants, de battants et de traverses. Les petits-bois n’avaient pas d’utilité quand on employait les panneaux de vitraux mis en plomb, et ils commencèrent à garnir les châssis quand on substitua aux panneaux mis en plomb des morceaux de verre taillés en assez grands fragments dans des boudines, c’est-à-dire dans des plaques de verre circulaire ayant au centre un renflement (voy. vitrail). Les châssis de croisée au moyen âge ne présentaient donc pas le réseau de petits-bois qui garnit les châssis du XVIIe siècle, et qui produit un effet si déplaisant à cause de la monotonie de ces compartiments égaux coupant le vide de la baie en quantité de petits parallélogrammes. Les panneaux de vitraux étaient fixés dans les feuillures des châssis au moyen d’un mastic recouvert d’une lanière de parchemin faisant corps avec ce mastic, ou simplement, pour les intérieurs où il n’importait pas d’obtenir un calfeutrage parfait, par des tourniquets dans le genre de ceux représentés ci-dessus en I. Alors, entre les panneaux, les tourniquets étant ouverts, on introduisait une bande de feutre épais à la jonction de ces panneaux, bande de feutre fendue au droit de chaque tourniquet ; puis on fermait ceux-ci qui alors exerçaient une pression sur ce feutre et empêchaient le ballotement des vitraux. Cet usage s’est conservé assez longtemps dans les provinces du centre, puisque nous avons encore vu de ces feutrages et tourniquets adaptés à des châssis du XVIe siècle.

Les châssis de croisée du XVe siècle, dans les hôtels et châteaux, composaient parfois une œuvre de menuiserie passablement compliquée.