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[ogive]
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une tranche séparée de la coupole, a été reporté de G′ en G et de H′ en H ; son sommet atteint le niveau de la clef I des arcs ogives ; puis, l’ossature ainsi établie, dans les triangles K restés vides on a bandé les voûtains K′, qui portent sur les arcs ogives, les arcs doubleaux, et qui sont tracés par les formerets L. Ce système offrait encore l’avantage de prendre des jours latéraux sous les formerets dans la hauteur même de la voûte.

Mais il était peu logique, ayant des points d’appuis égaux en force, en aed, de faire porter deux arcs ogives et un arc doubleau sur les piles ad, tandis qu’on ne chargeait la pile e que d’un seul arc doubleau. On prit donc, vers 1230, le parti de faire des grandes voûtes par travées, très-barlongues, et de charger également toutes les piles. C’est ainsi que sont construites les voûtes hautes des nefs des cathédrales d’Amiens et de Reims ; la coupole en est cependant le principe générateur comme pour les voûtes précédentes. Dans la cathédrale d’Amiens les arcs diagonaux ou ogives sont des plein-cintres, ou très-peu s’en faut ; mais dans celle de Reims la coupole génératrice des arcs ogives est tracée sur un triangle équilatéral, et l’épure de ces voûtes est aussi simple que profondément raisonnée.

En A (9) est donnée la projection horizontale d’une de ces voûtes hautes ; les piles étant en abcd, l’axe de ces piles donne les points de départ des deux arcs ogives ad, bc, ou plutôt les arcs ogives sont les diagonales d’un parallélogramme rectangle dont les angles tombent sur les axes des piles. Ces arcs ogives sont les tranches réservées d’une coupole dont la trace horizontale est donnée par le cercle iji′j′ et dont la section verticale est la courbe brisée klk′l′, inscrivant un triangle dont la base est à la hauteur comme 13 est à 10. — On remarquera que le tracé est donné par l’extra-dos. — L’extra-dos des arcs doubleaux rabattus en efg inscrit un triangle équilatéral ; l’extra-dos des formerets rabattus en hmn inscrit de même un triangle équilatéral ; la clef n de ces formerets atteint le niveau de la clef g des arcs doubleaux, de sorte que leur naissance est relevée en mh. Ces formerets sont d’ailleurs les archivoltes des fenêtres. Ainsi donc les conséquences du principe de la voûte d’arête dite gothique se simplifiaient rapidement. Les épures pouvaient être indiquées déjà vers 1230 par une simple formule. Le triangle équilatéral est toutefois rarement employé pour tracer les grands arcs doubleaux des voûtes, il est plutôt adopté pour les formerets dont il fallait relever les naissances (voy. construction).

Villars de Honnecourt[1], parmi ses croquis, trace la figure 10, sous laquelle il inscrit cette légende : « Par chu fait om trois manires dars, a compas ovrir one fois. » Ce qui veut dire : « Par ce moyen l’on fait trois manières d’arcs avec une seule ouverture de compas. » En effet, soit le rayon AB, nous traçons le demi-cercle (plein-cintre) CBD. Posant la pointe du compas en C, avec le même rayon nous traçons l’arc brisé

  1. Album de Villars de Honnecourt. Voir les éditions française et anglaise. Pl. XI.