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[transsept]
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Notre figure indique, en noir, toutes les constructions refaites alors. Un coup d’œil sur ce plan fait comprendre l’importance nouvelle que l’on donne au transsept et aux collatéraux qui l’accompagnent. La nef fut sensiblement élargie et se raccorda avec le sanctuaire, dont les écartements de piles furent conservés, par des biais, qui paraissent fort étranges si l’on ne se rend compte de l’état des constructions antérieures que l’on prétendait conserver vers l’abside.

Les piles B du sanctuaire furent refaites à neuf, celles T du rond-point sur des socles du XIIe siècle. Celles B furent fondées à nouveau dans la crypte, en passant à travers les voûtes carlovingiennes. On se contenta de rebâtir sur la vieille fondation les piles qui portent sur l’angle de l’abside mérovingienne ; mais au lieu des trois travées D, on n’en fit que deux, et les emmarchements montant au sanctuaire furent reportés en E. Des chapelles furent établies en F au niveau du sol du sanctuaire. Une des portes de l’ancien transsept de Suger fut remontée en G[1]. Saint Louis voulut refaire à neuf les tombeaux de ses prédécesseurs. Ces tombeaux furent disposés en H, c’est-à-dire sur l’emplacement qu’ils avaient occupé dans les églises précédentes. Celui de Dagobert s’éleva en L, très-probablement sur le lieu où la tradition plaçait sa sépulture[2]. Alors le chœur des religieux s’étendit dans la nef depuis le transsept jusqu’au point M, et le public put circuler dans les collatéraux et traverser les bras de croix. Des chapelles furent dédiées en N et en P. Beaucoup plus tard cette dernière fut occupée par le tombeau de François Ier. Au XIVe siècle, on éleva d’autres chapelles le long du collatéral nord en R. Les sépultures des abbés remplirent le croisillon S.

Ces plans superposés ont cela d’intéressant, qu’ils nous font reconnaître les modifications que le temps apporta dans les usages monastiques de l’une des plus puissantes abbayes de France. D’abord, comme dans l’église primitive, le transsept, très-étendu, relativement à la largeur de la nef, est fait pour contenir et enclore les religieux qui n’ont, avec les fidèles, aucune communication. Puis, sous les carlovingiens, tout en maintenant la disposition du transsept primitif, on y ajoute un sanctuaire profond, qui fait comme une seconde église propre à l’exhibition des reliques. Sous Suger, ce sanctuaire s’élargit, se garnit de chapelles nombreuses et le transsept s’ouvre davantage sur la nef. Enfin, au XIIe siècle, la clôture monastique, dans l’église, n’est plus absolue ; le chœur des religieux est complètement entouré des fidèles, qui ont accès partout comme dans les cathédrales, excepté dans le

  1. Une opération analogue fut faite à la cathédrale de Paris, à celles de Bourges et de Chartres. Les sculptures du XIIe siècle furent jugées dignes d’être conservées et furent remontées dans les constructions du XIIIe.
  2. En fouillant tout le centre du transsept, nous avons trouvé, au-dessous du sol de l’église de Dagobert, de nombreux sarcophages mérovingiens. (Voyez Tombeau , fig. 1.)