Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres I-VI.djvu/433

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les supplices, l’audace de contrefaire les feux du maître du monde et le bruit des carreaux célestes. Le superbe, monté sur un char pompeux, et brandissant une torche allumée, parcourait en triomphe, aux yeux des peuples de la Grèce, les murs tremblans d’Élis, et disputait aux dieux l’hommage et l’encens des mortels. Insensé, qui croyait, en poussant sur un pont d’airain son char retentissant, imiter le fracas des orages et le tonnerre inimitable ! Mais le fils de Saturne, du milieu des nues embrasées, lança contre ce dieu d’un jour, non les vains éclairs, non les stériles fumées d’un brandon pâlissant, mais la foudre véritable, et le précipita, couvert d’un tourbillon de flammes, dans le fond des enfers. Aux mêmes lieux gît ce colosse, nourrisson de la terre, Tityus, dont le corps étendu couvre neuf arpens tout entiers. Immortel aliment d’un immortel vautour, son foie sanglant se reproduit sans cesse sous d’horribles morsures ; et ses entrailles se fécondent, pour éterniser ses douleurs. Au fond de sa vaste poitrine, l’insatiable oiseau habite nuit et jour ; et les fibres qu’il ronge renaissent pour qu’il les ronge encore. Rappellerai-je les fiers Lapithes, Ixion et Pirithoüs ? Sur eux pend une sombre roche, toujours prête à tomber, toujours menaçant leur tête. Peindrai-je ces riches voluptueux, couchés sur des lits magnifiques, resplendissans de pourpre et d’or ? Sous leurs yeux sont servies des tables somptueuses, où brille le luxe des rois : mais la cruelle Mégère y siège à côté d’eux ; et chaque fois que leur main