Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/11

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moi s’ouvre un plus grand théâtre : j’aborde un plus grand sujet.

Roi de ces champs fortunés, de ces tranquilles provinces, Latinus, déjà blanchi par l’âge, les gouvernait depuis dix lustres dans une paix profonde. Faune et la nymphe Marica lui donnèrent, dit-on, le jour dans les bois sacrés de Laurente. Faune eut Picus pour père ; et c’est de toi, Saturne, que Picus reçut la naissance : c’est toi qui fus l’auteur de cette illustre race. Latinus n’avait eu qu’un fils, tendre fleur moissonnée par les dieux au matin de la vie. Seul espoir de sa maison, seule héritière de ses vastes états, une fille lui restait, déjà digne d’un époux, déjà mûre pour l’hyménée. Cent princes, honneur du Latium et de la puissante Ausonie, aspiraient à son alliance. De tous ces fiers amans, Turnus est le plus beau ; Turnus, enorgueilli du long éclat de ses aïeux ; Turnus, qu’une épouse reine désire avec ardeur de s’associer pour gendre : mais le ciel oppose à ces nœuds de sinistres présages.

Au centre du palais, dans une enceinte solitaire, s’élevait un vieux laurier aux rameaux vénérables, et qu’une crainte religieuse avait conservé d’âge en âge. Latinus le trouva, si le récit en est fidèle, comme il posait les fondemens de ses nouveaux remparts. Il t’en consacra le feuillage, ô Phébus ! et c’est de ce laurier célèbre que Laurente emprunta son nom. Un jour, d’innombrables abeilles, ô surprise ! traversant tout à coup les airs telles qu’un bruyant nuage, s’abattent en bourdonnant sur l’arbre d’Apollon, et,