Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/113

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horreur du lieu en écartait les timides colons ; déjà sa forêt, sa montagne, les frappaient de terreur. « Ce bois sombre, dit le monarque, ces cimes couronnées de mystérieux ombrages, on ne sait quel dieu les habite, mais un dieu s’y complaît. Là cent fois nos bergers tremblans ont cru voir Jupiter lui-même, secouant sa formidable égide, et rassemblant les orages. Non loin, ces murs en ruine qui frappent vos regards, ce sont les restes de deux cités, monumens des anciens rois. Le vieux Janus éleva l’une, Saturne a bâti l’autre : ici fut Janicule, et là fut Saturnie. »

Durant ces divers entretiens, ils approchaient de l’humble toit du fils d’Arcas ; et sur leur route, des troupeaux épars mugissaient, où tonne dans le Forum la voix des maîtres du monde, où brille dans sa pompe la magnificence des Carènes. On arrive au modeste séjour : « Voici le seuil, dit Évandre, que franchit le magnanime Alcide ; voici le palais qui le reçut vainqueur. Osez, prince, mépriser un vain faste ; et, noble émule d’un dieu, daignez, comme lui, vous asseoir sous le chaume de l’indigence. » À ces mots, il introduit le grand Énée dans l’étroite demeure, et l’invite à se reposer sur un lit de feuillage, couvert de la dépouille d’une ourse de Libye.

La nuit tombe, et de ses ailes ténébreuses enveloppe l’univers. Cependant Vénus, dont le cœur maternel frémit aux moindres alarmes, Vénus n’a pu voir sans effroi le soulèvement de l’Hespérie et ses apprêts tumultueux. Elle s’adresse à Vulcain, et, sur la couche d’or qui les reçoit ensemble, lui dit, de