Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/129

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fortuné, la Déesse ma mère l’avait prédit à mon amour, si la guerre s’allumait. Vulcain a forgé cette armure ; et Vénus, du haut des cieux, l’apporte à son fils pour sa défense. Ah ! malheureuse Laurente ! quel épouvantable carnage menace tes enfans ! Que tu me paieras cher, Turnus, ta folle audace ! Quel vaste amas de boucliers, de casques, de corps sanglans, tu rouleras dans tes flots, dieu du Tibre ! Qu’ils se liguent maintenant ! qu’ils rompent les traités ! »

À ces mots, Énée se lève du siège qu’il occupait. D’abord, il réveille les feux assoupis sur l’autel domestique, et se prosterne avec joie devant les Lares hospitaliers, devant les modestes Pénates qui l’accueillirent la veille. Son glaive religieux leur immole deux brebis sans taches ; Évandre y joint ses dons, Achate y joint ses offrandes. Ensuite le héros vole à ses galères, et revoit ses guerriers. Dans leur nombre, il choisit les plus intrépides, ceux qui doivent le suivre au milieu des hasards. Les autres s’abandonnent sur l’onde à sa pente insensible, et descendent mollement le fleuve dont le cours les seconde : ils vont apprendre au jeune Iule et le succès d’un père et sa nouvelle alliance. Bientôt sont prêts les coursiers qui porteront aux champs étrusques l’élite de Pergame. Le plus fier bondira sous Énée. La dépouille d’un lion superbe couvre tout entier l’animal belliqueux, et sur ses larges flancs brille armée d’ongles d’or.

Tout à coup le bruit a couru dans l’humble Pallantée qu’à l’instant part le rapide escadron dirigé sur