Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/199

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propres lances, ou déchirés par les débris des poutres en éclat. Seuls entre tous, Hélénor et Lycus ont eu le bonheur d’échapper. Le plus âgé des deux était Hélénor : né des amours furtives du roi des Méoniens et de Licymnie jeune, esclave, sa mère l’avait envoyé, malgré la loi des camps, au secours de Pergame : son armure est légère ; l’or n’enrichit pas son glaive, et son pavois sans images annonce un guerrier sans lustre. Dès qu’il se vit enveloppé des nombreux soldats de Turnus, qu’il aperçut de toutes parts les piques hérissées des phalanges latines, alors, tel qu’une bête farouche, qui, cernée tout à coup par un cercle épais de chasseurs, s’irrite contre les dards, voit la mort, et l’affronte, et franchit dans ses bonds la haie meurtrière qui l’entoure ; tel, sûr de périr, le guerrier furieux se précipite à travers les rangs ennemis, et cherche le trépas au milieu d’une forêt de lances.

Mais, plus agile à la course, Lycus a trompé par la fuite tant de bataillons et tant d’armes ; Lycus a regagné les murs. Déjà, de ses mains étendues, il atteignait le faîte des remparts, il s’attachait aux mains de ses compagnons. Non moins léger, Turnus le joint, le presse de sa lance, et, mêlant l’insulte à l’orgueil du triomphe : « Insensé ! s’écrie-t-il, espérais-tu donc te soustraire à mon bras ? » En même temps, il saisit l’infortuné suspendu dans les airs, l’entraîne, et renverse avec lui un vaste pan de la muraille. Ainsi l’oiseau qui porte le tonnerre fond sur un lièvre timide ou sur un cygne au plumage argenté, l’enlace de ses ongles retors, et se