Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/317

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père à détester le jour. Dieux ! quel appui te manque, généreuse Ausonie ! et toi, quel défenseur tu perds, cher Iule, ô mon fils ! »

Tels ses regrets s’exhalent. Il ordonne enfin qu’on emporte ces déplorables restes : choisis dans ses nombreuses phalanges, mille guerriers accompagneront par ses ordres la pompe funéraire, et mêleront leurs larmes aux larmes paternelles : faible consolation dans un malheur si grand ! mais bien due à l’affliction d’un père. À l’instant pour former un modeste cercueil, le chêne et l’arbousier s’empressent d’enlacer leurs rameaux : sur leur tissu flexible s’élève un lit de feuillage, qu’environne de son ombre un rideau de verdure. Là, sous ce dais agreste, des mains pieuses déposent l’infortuné Pallas. Telle on voit languir, cueillie par un doigt virginal, ou la tendre violette ou le pâle hyacinthe : la fleur n’a point encore perdu sa beauté, son éclat ; mais le sol maternel n’alimente plus sa tige, et la vie l’a quittée.

Le héros déploie alors deux voiles précieux, où se marient l’or et la pourpre : industrieux ouvrages qu’autrefois Didon, charmée d’un doux labeur, travailla pour Énée, et dont elle embellit la trame d’une riche broderie. De l’un il revêt, triste et dernier honneur ! les froides reliques du jeune prince ; il ceint de l’autre ces beaux cheveux qu’attend la flamme du bûcher. À sa voix, on rassemble les richesses conquises dans les champs de Laurente ; et ces dépouilles triomphales suivent en long appareil le funèbre cortège : les coursiers et les armes enlevés aux Latins en relèvent la pompe. Non loin paraissent, chargés de chaînes,