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L’ÉNÉIDE.


LIVRE DOUZIÈME.


Quand Turnus voit que les Latins, abattus par leurs revers, languissent sans forces et sans courage ; que toutes les voix l’appellent à remplir enfin ses promesses ; que tous les yeux sont attachés sur lui : sa fougue irritée s’emporte en bouillantes menaces, et sa fierté n’en est que plus altière. Comme, aux champs de la Numidie, un fier lion, atteint par les chasseurs d’une blessure profonde, déploie soudain ses redoutables armes, secoue en bondissant les longs crins de son cou nerveux, rompt sans peur le dard enfoncé dans ses flancs, et, rugissant de rage, présente à ses vainqueurs une gueule ensanglantée : tel, enflammé de colère, éclate l’impétueux Turnus.

Il s’adresse au vieux monarque ; et, plein du transport qui l’agite. « Turnus est prêt, s’écrie-t-il ; plus de prétextes pour les lâches Phrygiens de violer la foi promise, et de fouler aux pieds leurs sermens. Je descends dans l’arène. Dressez l’autel du sacrifice, prince auguste, et dictez le pacte sacré. Que les Latins immobiles restent spectateurs du combat : ou mes coups précipiteront aux enfers l’infâme Troyen, déserteur de l’Asie, et seul j’aurai vengé