Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/51

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charmaient surtout l’innocente Silvie. Souvent, elle ornait son bois naissant de guirlandes légères, peignait son poil sauvage, et le baignait dans l’eau pure des fontaines. Lui, sensible aux caresses, et familier convive du banquet domestique, il s’égarait durant le jour sous les lointains ombrages, et le soir, sans crainte des ténèbres, revenait avec joie au seuil accoutumé. Cette fois, pendant qu’il errait à l’écart, voici que la meute en furie le relance tout à coup, comme il sortait, humide encore, d’un limpide courant, et goûtait la fraîcheur le long de la rive émaillée. Brûlant lui-même de signaler son bras, Iule a courbé son arc et fait voler ses traits. Un dieu cruel en dirige l’essor. La flèche, fendant l’air à grand bruit, vient frapper au flanc sa victime, et lui déchire les entrailles. L’animal blessé cherche un refuge vers la cabane hospitalière, et se traîne en gémissant au fond de ses étables. Là, sanglant, les yeux gros de larmes, il semble implorer ses maîtres, et remplit de ses plaintes l’asyle témoin de ses derniers abois. Silvie la première, Silvie, désespérée, invoque à la fois tous les dieux, et soulève par ses cris l’essaim des pâtres d’alentour. Poussés par la noire Euménide, que recèle un antre complice, ils accourent en tumulte. L’un saisit un tison fumant, l’autre une souche aux nœuds épais : tout ce qu’ils trouvent, la colère en fait des armes. Tyrrhée, sous l’effort de ses coins, fendait alors les durs éclats d’un chêne. Aux clameurs qu’il entend, il vole, respirant la vengeance, et la hache à la main.

Cependant la cruelle Déesse, qu’invite le moment