Page:Virgile - Georgiques Delille 1819.djvu/269

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Je vais de ce grand art éterniser la gloire,
Et dès son origine en rappeler l’histoire.
Le peuple, dont le Nil inonde les sillons,
Qui, sur des vaisseaux peints voguant dans ses vallons,
Fend les flots nourriciers du fleuve qu’il adore,
Et de son noir limon voit la verdure éclore ;
Les voisins des Persans qu’il baigne de ses eaux ;
Les lieux où, vers la mer courant par sept canaux
Il fuit les cieux brûlants témoins de sa naissance,
De cet art précieux attestent la puissance.
Ce mystère d’abord veut des réduits secrets :
Il te faut donc choisir et préparer exprès
Un lieu dont la surface, étroitement bornée,
Soit enceinte de murs, et d’un toit couronnée ;
Et que des quatre points qui divisent le jour,
Une oblique clarté se glisse en ce séjour.
Là, conduis un taureau dont les cornes naissantes
Commencent à courber leurs pointes menaçantes ;
Qu’on l’étouffe, malgré ses efforts impuissants ;
Et, sans les déchirer, qu’on meurtrisse ses flancs.
Il expire : on le laisse en cette enceinte obscure,
Embaumé de lavande, entouré de verdure.
Choisis pour l’immoler le temps où des ruisseaux
Déjà les doux zéphyrs font frissonner les eaux,
Avant que sous nos toits voltige l’hirondelle,
Et que des prés fleuris l’émail se renouvelle.
Les humeurs cependant fermentent dans son sein.
Ô surprise ! ô merveille ! Un innombrable essaim
Dans ses flancs échauffés tout à coup vient d’éclore
Sur ses pieds mal formés l’insecte rampe encore ;
Sur des ailes bientôt il s’élève en tremblant ;
Plus vigoureux enfin, le bataillon volant
S’élance, aussi pressé que ces gouttes nombreuses