Page:Voltaire - Œuvres complètes, Beuchot, Tome 33, 1829.djvu/281

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une étrange chose. O Pangloss ! Pangloss ! que vous sériez aise si vous n’aviez pas été pendu !

Le commandant fit retirer les esclaves nègres et les Paraguains qui servaient à boire dans des gobelets de cristal de roche. Il remercia Dieu et saint Ignace mille fois ; il serrait Candide entre ses bras, leurs visages étaient baignés de pleurs. Vous seriez bien plus étonné, plus attendri, plus hors de vous-même, dit Candide, si je vous disais que mademoiselle Cunégonde, votre sœur, que vous avez crue éventrée, est pleine de santé.--Où ? --Dans votre voisinage, chez M. le gouverneur de Buénos-Ayres ; et je venais pour vous faire la guerre. Chaque mot qu’ils prononcèrent dans cette longue conversation accumulait prodige sur prodige. Leur âme tout entière volait sur leur langue, était attentive dans leurs oreilles, et étincelante dans leurs yeux. Comme ils étaient Allemands, ils tinrent table long-temps, en attendant le révérend père provincial ; et le commandant parla ainsi à son cher Candide.


Comment Candide tua le frère de sa chère Cunégonde.


J’aurai toute ma vie présent à la mémoire le jour horrible où je vis tuer mon père et ma mère, et violer ma sœur. Quand les Bulgares furent retirés, on ne trouva point cette sœur adorable, et on mit dans une charrette ma mère, mon père, et moi, deux servantes