Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/140

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Mahomet.

Qu’il l’immole, il le faut : il est né pour le crime :
Qu’il en soit l’instrument, qu’il en soit la victime.
Ma vengeance, mes feux, ma loi, ma sûreté,
L’irrévocable arrêt de la fatalité,
Tout le veut ; mais crois-tu que son jeune courage,
Nourri du fanatisme, en ait toute la rage ?

Omar.

Lui seul était formé pour remplir ton dessein.
Palmire à te servir excite encor sa main.
L’amour, le fanatisme, aveuglent sa jeunesse ;
Il sera furieux par excès de faiblesse.

Mahomet.

Par les nœuds des serments as-tu lié son cœur ?

Omar.

Du plus saint appareil la ténébreuse horreur,
Les autels, les serments, tout enchaîne Séide.
J’ai mis un fer sacré dans sa main parricide,
Et la religion le remplit de fureur.
Il vient.


Scène VI.

MAHOMET, OMAR, SÉIDE.
Mahomet.

Il vient.Enfant d’un dieu qui parle à votre cœur,
Écoutez par ma voix sa volonté suprême :
Il faut venger son culte, il faut venger Dieu même.

Séide.

Roi, pontife, et prophète, à qui je suis voué,
Maître des nations, par le ciel avoué,
Vous avez sur mon être une entière puissance ;
Éclairez seulement ma docile ignorance.
Un mortel venger Dieu !

Mahomet.

Un mortel venger Dieu !C’est par vos faibles mains
Qu’il veut épouvanter les profanes humains.

Séide.

Ah ! sans doute ce dieu, dont vous êtes l’image,
Va d’un combat illustre honorer mon courage.