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Scène IV.

MAHOMET, OMAR, sa suite, d’un côté ; SÉIDE et le peuple, de l’autre ; PALMIRE, au milieu.
Séide, un poignard à la main, mais déjà affaibli par le poison.

Peuple, vengez mon père, et courez à ce traître.

Mahomet.

Peuple, né pour me suivre, écoutez votre maître.

Séide.

N’écoutez point ce monstre, et suivez-moi… Grands dieux !
Quel nuage épaissi se répand sur mes yeux !

(Il avance, il chancelle.)

Frappons… Ciel ! je me meurs.

Mahomet.

Frappons… Ciel ! je me meurs.Je triomphe.

Palmire, courant à lui.

Frappons… Ciel ! je me meurs. Je triomphe.Ah, mon frère !
N’auras-tu pu verser que le sang de ton père ?

Séide.

Avançons. Je ne puis… Quel dieu vient m’accabler ?

(Il tombe entre les bras des siens.)
Mahomet.

Ainsi tout téméraire à mes yeux doit trembler.
Incrédules esprits, qu’un zèle aveugle inspire,
Qui m’osez blasphémer, et qui vengez Zopire,
Ce seul bras que la terre apprit à redouter,
Ce bras peut vous punir d’avoir osé douter.
Dieu qui m’a confié sa parole et sa foudre,
Si je me veux venger, va vous réduire en poudre.
Malheureux ! connaissez son prophète et sa loi,
Et que ce dieu soit juge entre Séide et moi.
De nous deux, à l’instant, que le coupable expire !

Palmire.

Mon frère ! eh quoi ! sur eux ce monstre a tant d’empire !
Ils demeurent glacés, ils tremblent à sa voix.
Mahomet, comme un dieu, leur dicte encor ses lois :
Et toi, Séide, aussi !

Séide, entre les bras des siens.

Et toi, Séide, aussi !Le ciel punit ton frère.
Mon crime était horrible autant qu’involontaire ;