Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/222

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Le traître avait jeté ces gages précieux,
Pour n'être point connu par ces marques sanglantes.

Mérope

Ah ! Que me dites-vous ? Mes mains, ces mains tremblantes
En armèrent Cresphonte, alors que de mes bras
Pour la première fois il courut aux combats. 
Ô dépouille trop chère, en quelles mains livrée !
Quoi ! Ce monstre avait pris cette armure sacrée ?

Euryclès

Celle qu'Égisthe même apportait en ces lieux.

Mérope

Et teinte de son sang on la montre à mes yeux !
Ce vieillard qu'on a vu dans le temple d'Alcide...

Euryclès

C'était Narbas ; c'était son déplorable guide ;
Polyphonte l'avoue.

Mérope

Affreuse vérité !
Hélas ! De l'assassin le bras ensanglanté,
Pour dérober aux yeux son crime et son parjure,
Donne à mon fils sanglant les flots pour sépulture ! 
Je vois tout. ô mon fils ! Quel horrible destin !

Euryclès

Voulez-vous tout savoir de ce lâche assassin ?


Scène VI

Mérope, Euryclès, Isménie, Érox , gardes de Polyphonte.

Érox

Madame, par ma voix, permettez que mon maître,
Trop dédaigné de vous, trop méconnu peut-être,
Dans ces cruels moments vous offre son secours.
Il a su que d'Égisthe on a tranché les jours ;
Et cette part qu'il prend aux malheurs de la reine...

Mérope

Il y prend part, Érox, et je le crois sans peine ;
Il en jouit du moins, et les destins l'ont mis
Au trône de Cresphonte, au trône de mon fils.