Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/585

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il prétend aujourd’hui, sous peine de sa haine,
Que de monsieur Gripon, et la fille et le fils
Par un beau mariage avec nous soient unis :
Je l’empêcherai bien, j’y fuis fort résolue.

Damis.

Et nous aussi.

Madame Duru.

Et nous aussi.Je crains quelque déconvenue,
Je crains de mon mari le courroux véhément.

Le Marquis.

Ne craignez rien de loin.

Madame Duru.

Ne craignez rien de loin.Son cher correspondant,
Maître Isaac Gripon, d’une âme fort rebourse[1],
Ferme depuis un an les cordons de sa bourse.

Damis.

Il vous en reste assez.

Madame Duru.

Il vous en reste assez.Oui, mais j’ai consulté.

Le Marquis.

Hélas ! consultez-nous.

Madame Duru.

Hélas ! consultez-nous.Sur la validité,
D’une telle démarche ; et l’on dit qu’à votre âge
On ne peut sûrement contracter mariage
Contre la volonté d’un propre père.

Damis.

Contre la volonté d’un propre père.Non,
Lorsque ce propre père, étant dans la maison,
Sur son droit de présence obstinément se fonde :
Mais quand ce propre père est dans un bout du monde,
On peut à l’autre bout se marier sans lui.

Le Marquis.

Oui, c’est ce qu’il faut faire, et quand ? dès aujourd’hui.

  1. Rebours, rebourse, revêche.