Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome10.djvu/53

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La belle courut de ce pas
Chercher au milieu du fracas
Celui qu’elle croyait volage.
« Il sera peut-être à Paris,
Dit-elle, avec les beaux esprits
Qui l’ont peint si doux et si sage. »
L’un d’eux lui dit : « Sur mon avis.
Vous pourriez vous tromper peut-être :
Macare n’est qu’en nos écrits ;
Nous l’avons peint sans le connaître. »
Elle aborda près du Palais,
Ferma les yeux, et passa vite :
Mon amant ne sera jamais
Dans cet abominable gîte ;
Au moins la cour a des attraits,
Macare aurait pu s’y méprendre ;
Mais les noirs suivants de Thémis
Sont les éternels ennemis
De l’objet qui me rend si tendre. »
Thélème au temple de Rameau,
Chez Melpomène, chez Thalie,
Au premier spectacle nouveau,
Croit trouver l’amant qui l’oublie.
Elle est priée à ces repas
Où président les délicats,
Nommés la bonne compagnie.
Des gens d’un agréable accueil
Y semblent, au premier coup d’œil,
De Macare être la copie.
Mais plus ils étaient occupés
Du soin flatteur de le paraître,
Et plus à ses yeux détrompés
Ils étaient éloignés de l’être.
Enfin Thélème au désespoir,
Lasse de chercher sans rien voir,
Dans sa retraite alla se rendre.
Le premier objet qu’elle y vit
Fut Macare auprès de son lit,
Qui l’attendait pour la surprendre.
« Vivez avec moi désormais,
Dit-il, dans une douce paix,
Sans trop chercher, sans trop prétendre ;