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DE LA PERSE, ET DU SADDER.

XCIe. Jour et nuit, pense à faire du bien : la vie est courte. Si, devant servir aujourd’hui ton prochain, tu attends à demain, fais pénitence. Célèbre les six Gahambârs : car Dieu a créé le monde en six fois dans l’espace d’une année, etc. Dans le temps des six Gahambârs ne refuse personne. Un jour le grand roi Giemshid ordonna au chef de ses cuisines de donner à manger à tous ceux qui se présenteraient ; le mauvais génie ou Satan se présenta sous la forme d’un voyageur ; quand il eut dîné, il demanda encore à manger, Giemshid ordonna qu’on lui servît un bœuf ; Satan ayant mangé le bœuf, Giemshid lui fit servir des chevaux ; Satan en demanda encore d’autres. Alors le juste Dieu envoya l’ange Behman, qui chassa le diable ; mais l’action de Giemshid fut agréable à Dieu.

N. B. On reconnaît bien le génie oriental dans cette allégorie.

Ce sont là les principaux dogmes des anciens Perses. Presque tous sont conformes à la religion naturelle de tous les peuples du monde ; les cérémonies sont partout différentes ; la vertu est partout la même ; c’est qu’elle vient de Dieu, le reste est des hommes.

Nous remarquerons seulement que les Parsis eurent toujours un baptême, et jamais la circoncision. Le baptême est commun à toutes les anciennes nations de l’Orient ; la circoncision des Égyptiens, des Arabes et des Juifs, est infiniment postérieure : car rien n’est plus naturel que de se laver ; et il a fallu bien des siècles avant d’imaginer qu’une opération contre la nature et contre la pudeur pût plaire à l’Être des êtres.

Nous passons tout ce qui concerne des cérémonies inutiles pour nous, ridicules à nos yeux, liées à des usages que nous ne connaissons plus. Nous supprimons aussi toutes les amplifications orientales, et toutes ces figures gigantesques, incohérentes et fausses, si familières à tous ces peuples, chez lesquels il n’y a peut-être jamais eu que l’auteur des fables attribuées à Ésope qui ait écrit naturellement.

Nous savons assez que le bon goût n’a jamais été connu dans l’Orient, parce que les hommes, n’y ayant jamais vécu en société avec les femmes, et ayant presque toujours été dans la retraite, n’eurent pas les mêmes occasions de se former l’esprit qu’eurent les Grecs et les Romains. Otez aux Arabes, aux Persans, aux Juifs, le soleil et la lune, les montagnes et les vallées, les dragons et les basilics, il ne leur reste presque plus de poésie.

Il suffit de savoir que ces préceptes de Zoroastre, rapportés dans le Sadder, sont de l’antiquité la plus haute, qu’il y est parlé de rois dont Bérose lui-même ne fait pas mention.