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CHARLEMAGNE.

sions de barbares qui venaient tour à tour enlever des troupeaux et ravager des moissons. Point de place forte, point de politique, point de dessein formé ; cette partie du monde était encore sauvage.

Pepin, après ses victoires, ne gagna que le payement d’un ancien tribut de trois cents chevaux, auquel on ajouta cinq cents vaches : ce n’était pas la peine d’égorger tant de milliers d’hommes.

758-759-760, Didier, successeur du roi Astolphe, reprend les villes données par Pepin à saint Pierre ; mais Pepin était si redoutable que Didier les rendit, à ce qu’on prétend, sur ses seules menaces. Le vasselage héréditaire commençait si bien à s’introduire que les rois de France prétendaient être seigneurs suzerains du duché d’Aquitaine. Pepin force, les armes à la main, Gaifre, duc d’Aquitaine, à lui prêter serment de fidélité en présence du duc de Bavière ; de sorte qu’il eut deux grands souverains à ses genoux. On sent bien que ces hommages n’étaient que ceux de la faiblesse à la force.

762-763. Le duc de Bavière, qui se croit assez puissant et qui voit Pepin loin de lui, révoque son hommage. On est prêt de lui faire la guerre, et il renouvelle son serment de fidélité.

766-767. Érection de l’évêché de Saltzbourg. Le pape Paul Ier envoie au roi des livres, des chantres, et une horloge à roues. Constantin Copronyme lui envoie aussi un orgue et quelques musiciens. Ce ne serait pas un fait digne de l’histoire s’il ne faisait voir combien les arts étaient étrangers dans cette partie du monde. Les Francs ne connaissaient alors que la guerre, la chasse, et la table.

768. Les années précédentes sont stériles en événements, et par conséquent heureuses pour les peuples ; car presque tous les grands traits de l’histoire sont des malheurs publics. Le duc d’Aquitaine révoque son hommage, à l’exemple du duc de Bavière, Pepin vole à lui, et réunit l’Aquitaine à la couronne.

Pepin, surnommé le Bref, meurt à Saintes[1], le 24 septembre, âgé de cinquante-quatre ans. Avant sa mort il fait son testament de bouche, et non par écrit, en présence des grands officiers de sa maison, de ses généraux, et des possesseurs à vie des grandes terres. Il partage tous ses États entre ses deux enfants, Charles et Carloman. Après la mort de Pepin, les seigneurs modifient ses volontés. On donne à Carl, que nous avons depuis appelé Char-

  1. Il y tomba malade, mais il mourut à Saint-Denis.