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HENRI V.

Enfin l’empereur pense à l’Italie et à la couronne impériale ; et le pape Pascal II, pour l’inquiéter, renouvelle la querelle des investitures.

Henri V envoie à Rome des ambassadeurs, suivis d’une armée. Cependant il promet, par un écrit consente encore au Vatican, de renoncer aux investitures, de laisser aux papes tout ce que les empereurs leur ont donné, et, ce qui est assez étrange après de telles soumissions, il promet de ne tuer ni de mutiler le souverain pontife.

Pascal II, par le même acte, promet d’ordonner aux évêques d’abandonner à l’empereur tous leurs fiefs relevants de l’empire : par cet accord, les évêques perdaient beaucoup, le pape et l’empereur gagnaient.

Tous les évêques d’Italie et d’Allemagne qui étaient à Rome protestent contre cet accord ; Henri V, pour les apaiser, leur propose d’être fermiers des terres dont ils étaient auparavant en possession. Les évêques ne veulent point du tout être fermiers.

Henri V, lassé de toutes ces contestations, dit qu’il veut être couronné et sacré sans aucune condition. Tout cela se passait dans l’église de Saint-Pierre pendant la messe ; et à la fin de la messe l’empereur fait arrêter le pape par ses gardes.

Il se fait un soulèvement dans Rome en faveur du pape. L’empereur est obligé de se sauver ; il revient sur-le-champ avec des troupes, donne dans Rome un sanglant combat, tue beaucoup de Romains, et surtout de prêtres, et emmène le pape prisonnier avec quelques cardinaux.

Pascal fut plus doux en prison qu’à l’autel. Il fit tout ce que l’empereur voulut. Henri V, au bout de deux mois, reconduit à Rome le saint père à la tête de ses troupes. Le pape le couronne empereur le 13 avril, et lui donne en même temps la bulle par laquelle il lui confirme le droit des investitures. Il est remarquable qu’il ne lui donne, dans cette bulle, que le titre de dilection. Il l’est encore plus que l’empereur et le pape communièrent de la même hostie, et que le pape dit, en donnant la moitié de l’hostie à l’empereur : « Comme cette partie du sacrement est divisée de l’autre, que le premier de nous deux qui rompra la paix soit séparé du royaume de Jésus-Christ. »

Henri V achève cette comédie en demandant au pape la permission de faire enterrer son père en terre sainte, lui assurant qu’il est mort pénitent : et il retourne en Allemagne faire les obsèques de Henri IV, sans avoir affermi son pouvoir en Italie.

Pascal II ne trouva pas mauvais que les cardinaux et ses