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ANNALES DE L’EMPIRE.

Nouvelle croisade. L’empereur prend la croix : il fallait qu’il doutât encore de sa puissance, puisqu’il promet au pape Innocent III de ne point réunir Naples et Sicile à l’empire, et de les donner à son fils dès qu’il aura été sacré à Rome.

1216. Frédéric II reste en Allemagne avec sa croix, et a plus de desseins sur l’Italie que sur la Palestine. Il disait hautement que la vraie terre de promission était Naples et Sicile, et non pas les déserts et les cavernes de Judée. La croisade est en vain prêchée à tous les rois. Il n’y a cette fois qu’André II, roi des Hongrois, qui parte. Ce peuple, qui à peine était chrétien, prend la croix contre les musulmans, qu’on nomme infidèles.

1217. Les Allemands croisés n’en partent pas moins sous divers chefs par terre et par mer. La flotte des Pays-Bas, arrêtée par les vents contraires, fournit encore aux croisés l’occasion d’employer utilement leurs armes vers l’Espagne. Ils se joignent aux Portugais, et battent les Maures. On pouvait poursuivre cette victoire, et délivrer enfin l’Espagne entière : le pape Honorius III, successeur d’Innocent, ne veut pas le permettre. Les papes commandaient aux croisés comme aux milices de Dieu ; mais ils ne pouvaient que les envoyer en Orient. On ne gouverne les hommes que suivant leurs préjugés, et ces soldats des papes n’eussent point obéi ailleurs.

1218. Frédéric II avait grande raison de n’être point du voyage. Les villes d’Italie, et surtout Milan, refusaient de reconnaître un souverain qui, maître de l’Allemagne et de Naples, pouvait asservir toute l’Italie. Elles tenaient encore le parti d’Othon IV, qui vivait obscurément dans un coin de l’Allemagne. Le reconnaître pour empereur, c’était en effet être entièrement libres.

Othon meurt auprès de Brunsvick, et la Lombardie n’a plus de prétexte.

1219. Grande diète à Francfort, où Frédéric II fait élire roi des Romains son fils Henri, âgé de neuf ans, né de Constance d’Aragon. Toutes ces diètes se tenaient en plein champ, comme aujourd’hui[1] encore en Pologne.

L’empereur renonce au droit de la jouissance du mobilier des évêques défunts, et des revenus pendant la vacance. C’est ce qu’en France on appelle la régale. Il renonce au droit de juridiction dans les villes épiscopales où l’empereur se trouvera sans y tenir sa cour. Presque tous les premiers actes de ce prince sont des renonciations.

  1. Année 1753.