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FRÉDÉRIC II.

comme celle de Hongrie, de Pologne, de Bohême. Les empereurs prétendaient aussi les avoir données. Les papes et les césars, qui n’étaient pas maîtres dans Rome, se disputaient toujours le droit de faire des rois au bout de l’Europe. On n’eut aucun égard aux ordres d’Honorius. Les chevaliers de l’ordre teutonique se joignent à l’évêque de Riga en Livonie, et se rendent maîtres d’une partie des côtes de la mer Baltique.

Lubeck, Hambourg, reprennent leur liberté et leurs droits. Valdemar et son fils, dépouillés de presque tout ce qu’ils avaient dans ces pays, ne sont mis en liberté qu’en payant une grosse rançon.

On voit ici une nouvelle puissance s’établir insensiblement : c’est cet ordre teutonique ; il a déjà un grand-maître ; il a des fiefs en Allemagne, et il conquiert des terres vers la mer Baltique.

1226. Ce grand maître. de l’ordre teutonique sollicite en Allemagne de nouveaux secours pour la Palestine. Le pape Honorius presse en Italie l’empereur d’en sortir au plus vite, et d’aller accomplir son vœu en Syrie. Il faut observer qu’alors il y avait une trêve de neuf ans entre le sultan d’Égypte et les croisés. Frédéric II n’avait donc point de vœu à remplir. Il promet d’entretenir des chevaliers en Palestine, et n’est point excommunié. Il devait s’établir en Lombardie, et ensuite à Rome, plutôt qu’à Jérusalem. Les villes lombardes avaient eu le temps de s’associer ; on leur donnait le titre de villes confédérées. Milan et Bologne étaient à la tête ; on ne les regardait plus comme sujettes, mais comme vassales de l’empire. Frédéric II voulait au moins les attacher à lui ; et cela était difficile. Il indique une diète à Crémone, et y appelle tous les seigneurs italiens et allemands.

Le pape, qui craint que l’empereur ne prenne trop d’autorité dans cette diète, lui suscite des affaires à Naples. Il nomme à cinq évêchés vacants dans ce royaume sans consulter Frédéric ; il empêche plusieurs villes, plusieurs seigneurs, de venir à l’assemblée de Crémone ; il soutient les droits des villes associées, et se rend le défenseur de la liberté italique.

1227. Beau triomphe du pape Honorius III. L’empereur, ayant mis Milan au ban de l’empire, ayant transféré à Naples l’université de Bologne, prend le pape pour juge. Toutes les villes se soumettent à sa décision. Le pape, arbitre entre l’empereur et l’Italie, donne son arrêt : « Nous ordonnons, dit-il, que l’empereur oublie son ressentiment contre toutes les villes ; et nous ordonnons que les villes fournissent et entretiennent quatre cents chevaliers pour le secours de la Terre Sainte pendant deux ans. » C’était parler dignement à la fois en souverain et en pontife.