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ALBERT Ier D’AUTRICHE.
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grand que ces entreprises quand elles sont bien conduites et heureuses : rien de plus petit quand elles sont sans effet. Ce pape, en moins de trois ans, donna les empires d’Orient et d’Occident, et mit en interdit le royaume de France.

Les circonstances où se trouvait l’Allemagne le mirent sur le point de réussir contre Albert d’Autriche.

Il écrit aux archevêques de Mayence, de Trêves et de Cologne : « Nous ordonnons qu’Albert comparaisse devant nous dans six mois, pour se justifier, s’il peut, du crime de lèse-majesté, commis contre la personne de son souverain Adolphe. Nous défendons qu’on le reconnaisse pour roi des Romains, etc. »

Ces trois archevêques, qui n’aimaient pas Albert, conviennent avec le comte palatin du Rhin de procéder contre lui, comme ils avaient procédé contre son prédécesseur ; et, ce qui montre bien qu’on a toujours deux poids et deux mesures, c’est qu’ils lui font un crime d’avoir vaincu et tué en combattant ce même Adolphe qu’ils avaient déposé, et contre lequel il avait été armé par eux-mêmes.

Le comte palatin fait en effet des informations contre l’empereur Albert. On sait que les comtes palatins étaient originairement juges dans le palais, et juges des causes civiles entre le prince et les sujets, comme cela se pratique dans tous les pays sous des noms différents.

Les palatins se croyaient en droit de juger criminellement l’empereur même. C’est sur cette prétention qu’on verra un palatin, un ban de Croatie condamner une reine[1]. Albert, ayant pour lui les autres princes de l’empire, répond aux procédures par la guerre.

1302. Bientôt ses juges lui demandent grâce, et l’électeur palatin paye par une grosse somme d’argent ses procédures.

La Pologne, après beaucoup de troubles, élit pour son roi Venceslas[2] roi de Bohême. Venceslas met quelque ordre dans un pays où il n’y en avait jamais eu. C’est lui qui institua le sénat. Ce Venceslas donne son fils pour roi aux Hongrois, qui le demandaient eux-mêmes.

Boniface VIII ne manque pas de prétendre que c’est un attentat contre lui, et qu’il n’appartient qu’à lui seul de donner un roi à la Hongrie. Il nomme à ce royaume Charobert[3], descendant de

  1. Élisabeth de Hongrie. Voyez année 1389 ; et tome XII, page 231.
  2. Cette élection de Venceslas, gendre de Rodolphe Ier, eut lieu en 1390.
  3. Voyez tome XII, page 232 ; et, ci-après, les années 1307, 1311-12, 1331.