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ANNALES DE L’EMPIRE.

paraît que l’Anglais fit mieux sa partie que le Français. Philippe de Valois a pour lui le roi de Bohême, et Édouard a tous les princes voisins de la France. Il a surtout pour lui l’empereur ; il n’en obtient à la vérité que des lettres patentes, mais ces lettres patentes sont de vicaire de l’empire. Le fier Édouard consent volontiers à exercer ce vicariat, pour tâcher de faire déclarer guerre de l’empire la guerre contre la France. Ses provisions portent qu’il pourra faire battre monnaie dans toutes les terres de l’empire : rien ne prouve mieux ce respect secret qu’on avait dans toute l’Europe pour la dignité impériale.

Pendant qu’Édouard s’appuie des forces temporelles de l’Allemagne, Philippe de Valois cherche à faire agir les forces spirituelles du pape : elles étaient alors bien peu de chose.

Le pape Benoît XII, encore dans Avignon comme ses prédécesseurs, était dépendant du roi de France.

Il faut savoir que l’empereur, n’ayant point été absous par le pape, demeurait toujours excommunié, et privé de ses droits dans l’opinion vulgaire de ces temps-là.

Philippe de Valois, qui peut tout sur un pape d’Avignon, force Benoît XII à différer l’absolution de l’empereur. Ainsi l’autorité d’un prince dirige souvent le ministère pontifical, et ce ministère, à son tour, suscite quelques princes. Il y a un Henri, duc de Bavière, parent de Louis l’empereur, prenant toujours, selon l’usage, ce titre de duc sans avoir le duché, mais possédant une partie de la Bavière inférieure. Ce Henri demande pardon au pape par ses députés d’avoir reconnu son parent empereur. Cette bassesse ne produit dans l’empire aucune des révolutions qu’on en attendait.

1338. Le pape Benoît XII avoue que c’est Philippe de Valois, roi de France, qui l’empêche de réconcilier à l’Église l’empereur Louis. Voilà comme presque tous les papes n’ont été que les instruments d’une force étrangère. Ils ressemblaient souvent aux dieux des Indiens, à qui on demande de la pluie à genoux, et qu’on traîne dans la rivière quand on n’est pas exaucé.

Grande assemblée des princes de l’empire à Rentz sur le Rhin. On y déclare, ce qui ne devrait pas avoir besoin d’être déclaré, que « celui qui a été élu par le plus grand nombre est véritable empereur ; que la confirmation du pape est absolument inutile ; que le pape a encore moins le droit de déposer l’empereur ; et que l’opinion contraire est un crime de lèse-majesté ».

Cette déclaration passe en loi perpétuelle le 8 auguste à Francfort.

Albert d’Autriche, surnommé d’abord le Contrefait, et qui