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ANNALES DE L’EMPIRE.

monnaie : ce conte a l’air d’une fable ; mais cette fable est fondée sur son caractère.

Il vendait des priviléges à toutes les villes ; il vendait au comte de Savoie le titre de vicaire de l’empire ; il donne, pour des sommes très-légères, le titre de villes impériales à Mayence, à Vorms, à Spire, et même à Genève ; il confirmait la liberté de la ville de Florence à prix d’argent. Il en tirait de Venise pour la souveraineté de Vérone, de Padoue, et de Vicence ; mais ceux qui le payèrent le plus chèrement furent les Viscontis, pour avoir la puissance héréditaire dans Milan sous le titre de gouverneur : on prétend qu’il vendait ainsi en détail l’empire qu’il avait acheté en gros.

1359. Les princes de l’empire, excités par les universités d’Allemagne, représentent à Charles IV que, parmi les bulles de Clément VI, il y en a de déshonorantes pour lui et pour le corps germanique ; entre autres celle où il est dit que « les empereurs sont les vassaux du pape, et lui prêtent serment de fidélité ». Charles, qui avait assez vécu pour savoir que toutes ces formules ne méritent d’attention que quand elles sont soutenues par les armes, se plaint au pape, pour ne pas fâcher le corps germanique, mais modérément pour ne pas fâcher le pape. Innocent VI lui répond que cette proposition est devenue une loi fondamentale de l’Église, enseignée dans toutes les écoles de théologie ; et, pour appuyer sa réponse, il envoie d’Avignon en Allemagne un évêque de Cavaillon demander, pour l’entretien du saint-père, le dixième de tous les revenus ecclésiastiques.

Le prélat de Cavaillon s’en retourna à Avignon, après avoir reçu de fortes plaintes au lieu d’argent. Le clergé allemand éclata contre le pape, et c’est une des premières semences de la révolution dans l’Église, qu’on voit aujourd’hui.

Rescrit de Charles IV en faveur des ecclésiastiques, pour les protéger contre les princes qui veulent les empêcher de recevoir des biens, et de contracter avec les laïques.

1360. Charles IV, en faisant des règlements en Allemagne, abandonnait l’Italie. Les Viscontis étaient toujours maîtres de Milan. Darnabo veut conserver Bologne, que son oncle, archevêque, guerrier, et politique, avait achetée pour douze années. C’est la première et la dernière fois qu’on a vu faire un bail à ferme d’une principauté.

Un légat espagnol, nommé d’Albornos, entre dans cette ville au nom du pape, qui est toujours à Avignon, et donne Bologne au pape.