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ANNALES DE L’EMPIRE.

le reçoit le 10 septembre, dans la grand’salle de l’ancien palais où l’on rend la justice. Le héraut voulut parler avant de montrer la lettre de son maître, qui assurait le camp. Le roi lui impose silence, et veut voir seulement la lettre ; elle ne fut point montrée. Deux grands rois s’en tinrent à se donner des démentis par des hérauts d’armes. Il y a dans ces procédés un air de chevalerie et de ridicule bien éloigné de nos mœurs.

Pendant toutes ces rodomontades, Charles-Quint perdait tout le fruit de la bataille de Pavie, de la prise du roi de France, et de celle du pape. Il allait même perdre le royaume de Naples. Lautrec avait déjà pris toute l’Abruzze. Les Vénitiens s’étaient emparés de plusieurs villes maritimes du royaume. Le célèbre André Doria, qui alors servait la France, avait, avec les galères de Gênes, battu la flotte impériale. L’empereur qui, six mois auparavant, était maître de l’Italie, allait en être chassé ; mais il fallait que les Français perdissent toujours en Italie ce qu’ils avaient gagné.

La contagion se met dans leur armée : Lautrec meurt. Le royaume de Naples est évacué. Henri, duc de Drunsvick, avec une nouvelle armée, vient défendre le Milanais contre les Français et contre Sforce.

Doria, qui avait tant contribué aux succès de la France, justement mécontent de François Ier, et craignant même d’être arrêté, l’abandonne, et passe au service de l’empereur avec ses galères.

La guerre se continue dans le Milanais. Le pape Clément VII, en attendant l’événement, négocie. Ce n’est plus le temps d’excommunier un empereur, de transférer son sceptre dans d’autres mains par l’ordre de Dieu. On en eût agi ainsi autrefois pour le seul refus de mener la mule du pape par la bride ; mais le pape, après sa prison, après le saccagement de Rome, inefficacement secouru par les Français, craignant même les Vénitiens ses alliés, voulant établir sa maison à Florence, voyant enfin la Suède, le Danemark, la moitié de l’Allemagne, renoncer à l’Église romaine, le pape, dis-je, en ces extrémités, ménageait et redoutait Charles-Quint au point que, loin d’oser casser le mariage de Henri VIII avec Catherine, tante de Charles, il était prêt d’excommunier cet Henri VIII, son allié, dès que Charles l’exigerait.

1529. Le roi d’Angleterre, livré à ses passions, ne songe plus qu’à se séparer de sa femme Catherine d’Aragon, femme vertueuse, dont il a une fille depuis tant d’années, et à épouser sa maîtresse Anne de Bolein, ou Bollen, ou Bowlen.

François Ier laisse toujours ses deux enfants prisonniers auprès de Charles-Quint en Espagne, et lui fait la guerre dans le Mila-