Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome13.djvu/509

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
497
CHARLES-QUINT

nais. Le duc François Sforce est toujours ligué avec ce roi, et demande grâce à l’empereur, voulant avoir son duché des mains du plus fort, et craignant de le perdre par l’un ou par l’autre. Les catholiques et les protestants déchirent l’Allemagne : le sultan Soliman se prépare à l’attaquer ; et Charles-Quint est à Valladolid.

Le vieil Antoine de Lève, l’un de ses plus grands généraux, à l’âge de soixante et treize ans, malade de la goutte, et porté sur un brancard, défait les Français dans le Milanais, aux environs de Pavie : ce qui en reste se dissipe, et ils disparaissent de cette terre qui leur a été si funeste.

Le pape négociait toujours, et avait heureusement conclu son traité avant que les Français reçussent ce dernier coup. L’empereur traita généreusement le pape : premièrement, pour réparer aux yeux des catholiques, dont il avait besoin, le scandale de Rome saccagée ; secondement, pour engager le pontife à opposer les armes de la religion à l’autre scandale qu’on allait donner à Londres en cassant le mariage de sa tante, et en déclarant bâtarde sa cousine Marie, cette même Marie qu’il avait dû épouser ; troisièmement, parce que les Français n’étaient pas encore expulsés d’Italie quand le traité fut conclu.

L’empereur accorde donc à Clément VII Ravenne, Cervia, Modène, Reggio, le laisse en liberté de poursuivre ses prétentions sur Ferrare, lui promet de donner la Toscane à Alexandre de Médicis. Ce traité si avantageux pour le pape est ratifié à Barcelone.

Immédiatement après il s’accommode aussi avec François Ier ; il en coûte deux millions d’écus d’or à ce roi pour racheter ses enfants, et cinq cent mille écus que François doit encore payer à Henri VIII pour le dédit auquel Charles-Quint s’était soumis en n’épousant pas sa cousine Marie.

Ce n’était certainement pas à François Ier à payer les dédits de Charles-Quint ; mais il était vaincu : il fallait racheter ses enfants. Deux millions cinq cent mille écus d’or appauvrissaient à la vérité la France, mais ne valaient pas la Bourgogne que le roi gardait ; d’ailleurs on s’accommoda avec le roi d’Angleterre, qui n’eut jamais l’argent du dédit.

Alors la France, appauvrie, ne paraît point à craindre : l’Italie attend les ordres de l’empereur ; les Vénitiens temporisent ; l’Allemagne craint les Turcs, et dispute sur la religion.

Ferdinand assemble la diète de Spire, où les luthériens prennent le nom de protestants, parce que la Saxe, la Hesse, le Lunebourg, Anhalt, quatorze villes impériales, protestent contre l’édit de Ferdinand, et appellent au futur concile.