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ANNALES DE L’EMPIRE.

cousses ; et, à la moindre occasion, il se trouvait quelque prince protestant qui armait en sa faveur. Le landgrave de Hesse-Cassel disputait quelques terres au landgrave de Darmstadt. Piqué contre l’empereur, qui favorisait son compétiteur, il soutenait, autant qu’il le pouvait, le parti de l’électeur palatin. Le margrave de Bade-Dourlach s’unissait avec Mansfeld ; et, en général, tous les princes protestants, craignant de se voir bientôt forcés de restituer les biens ecclésiastiques, paraissaient disposés à prendre les armes dès qu’ils seraient secondés de quelques puissances.

1622. C’est toujours le duc de Bavière[1] qui fait le bonheur de Ferdinand. Ce sont ses généraux et ses troupes qui achèvent de ruiner le parti du palatin son parent, Tilly, général bavarois, qui depuis fut un des plus grands généraux de l’empereur, défait entièrement auprès d’Aschafenbourg ce prince de Brunsvick surnommé à bon droit l’ennemi des prêtres, puisqu’il venait de piller l’abbaye de Fulde et toutes les terres ecclésiastiques de cette partie de l’Allemagne.

Il ne restait plus que Mansfeld[2] qui pût défendre encore le Palatinat ; et il en était capable, étant à la tête d’une petite armée qui, avec les débris de celle de Brunsvick, allait jusqu’à dix mille hommes. Mansfeld était un homme extraordinaire, bâtard d’un comte de ce nom, n’ayant de fortune que son courage et son habileté ; secouru en secret des princes d’Orange et des autres protestants, il se trouvait général d’une armée qui n’appartenait qu’à lui.

Le malheureux Frédéric fut assez mal conseillé pour renoncer à ce secours, dans l’espérance qu’il obtiendrait de l’empereur des conditions favorables qu’il ne pouvait obtenir que par la force. Il pressa lui-même Brunsvick et Mansfeld de l’abandonner. Ces deux chefs errants passent en Lorraine et en Alsace, et cherchent de nouveaux pays à ravager.

Alors Ferdinand II, pour tout accommodement avec l’électeur palatin, envoie Tilly, victorieux, prendre Heidelberg, Manheim, et le reste du pays ; tout ce qui appartenait à l’électeur fut regardé comme le bien d’un proscrit. Il avait la plus nombreuse et la plus belle bibliothèque d’Allemagne, surtout en manuscrits ; elle fut transportée chez le duc de Bavière, qui l’envoya par eau à

  1. Voyez années 1605 et 1623.
  2. Ernest, comte de Mansfeld, marquis de Castel-Nuovo, né en 1585, eut pour père Pierre-Ernest, né en 1517, que Voltaire cite plus haut, année 1555, sous le simple nom d’Ernest. (Cl.)