Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome13.djvu/586

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
574
ANNALES DE L’EMPIRE.

se racheter du pillage. Le palatin eut du moins la consolation d’entrer avec Gustave dans le palais de celui qui l’avait dépossédé.

Les affaires de l’empereur et de l’Allemagne semblaient désespérées. Tilly, grand général, qui n’avait été malheureux que contre Gustave, était mort. Le duc de Bavière, mécontent de l’empereur, était sa victime, et se voyait chassé de sa capitale. Valstein, créé duc de Friedland, plus mécontent encore du duc électeur de Bavière. Maximilien, son rival déclaré, avait refusé de marcher à son secours ; et l’empereur Ferdinand, qui n’avait jamais voulu paraître en campagne, attendait sa destinée de ce Valstein, qu’il n’aimait pas, et dont il était en défiance. Valstein s’occupait alors à reprendre la Bohême sur l’électeur de Saxe, et il avait autant d’avantage sur les Saxons que Gustave en avait sur les Impériaux.

Enfin l’électeur de Bavière obtient avec peine que Valstein se joigne à lui. L’armée bavaroise, levée en partie aux dépens de l’électeur, et en partie aux dépens de la ligue catholique, était d’environ vingt-cinq mille hommes. Celle de Valstein était de près de trente mille vieux soldats. Le roi de Suède n’en avait pas vingt mille ; mais on lui amène des renforts de tous côtés. Le landgrave de Hesse-Cassel, Guillaume, et Bernard de Saxe-Veimar, le prince palatin de Birkenfeld, se joignent à lui. Son général Bannier lui amène de nouvelles troupes. Il marche, auprès de Nurenberg, avec plus de cinquante mille combattants, au camp retranché du duc de Bavière et de Valstein. Ils donnent une bataille qui n’est point décisive. Gustave reporte la guerre dans la Bavière, Valstein la reporte dans la Saxe ; et tous ces différents mouvements achèvent le ravage de ces provinces.

Gustave revole vers la Saxe en laissant douze mille hommes dans la Bavière. Il arrive près de Leipsick par des marches précipitées, et se trouve devant Valstein, qui ne s’y attendait pas. À peine est-il arrivé qu’il se prépare à donner bataille.

Il la donne dans la grande plaine de Lutzen, le 15 novembre. La victoire est longtemps disputée. Les Suédois la remportent ; mais ils perdent leur roi, dont le corps fut trouvé parmi les morts, percé de deux balles et de deux coups d’épée. Le duc Bernard de Saxe-Veimar acheva la victoire que Gustave avait commencée avant d’être tué. Que n’a-t-on pas écrit sur la mort de ce grand homme ! On accusa un prince de l’empire, qui servait dans son armée, de l’avoir assassiné ; on imputa sa mort au cardinal de Richelieu, qui avait besoin de sa vie. N’est-il donc pas naturel qu’un roi, qui s’exposait en soldat, soit mort en soldat ?