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ANNALES DE L’EMPIRE.

pays qui n’en fut pas le théâtre, soit du temps de Gustave, soit après lui. La branche d’Autriche espagnole n’avait encore secouru que faiblement la branche impériale; elle fait enfin un effort : elle envoie le duc de Féria d’Italie en Allemagne avec environ vingt mille hommes ; mais il perd une grande partie de son armée dans ses marches et dans ses manœuvres.

L’électeur de Trêves[1], évêque de Spire, avait bâti et fortifié Philipsbourg. Les troupes impériales s’en étaient emparées malgré lui, Oxenstiern la fait rendre ù l’électeur par les armes des Suédois, malgré le duc de Féria, qui veut en vain faire lever le siége. Cette sage politique tendait à faire voir à l’Europe que ce n’était pas à la religion catholique qu’on en voulait, et que la Suède, toujours victorieuse, même après la mort de son roi, protégeait également les protestants et les catholiques : conduite qui mettait encore plus le pape en droit de refuser à l’empereur des troupes, de l’argent, et une croisade.

1634. La France n’était encore qu’une partie secrète dans ce grand démêlé : il ne lui en coûtait qu’un subside médiocre pour voir le trône de Ferdinand ébranlé par les armes suédoises ; mais le cardinal de Richelieu songeait déjà à profiter de leurs conquêtes. Il avait voulu en vain avoir Philipsbourg en séquestre ; mais, à chaque occasion qui se présentait, la France se rendait maîtresse de quelques villes en Alsace, comme de Haguenau, de Saverne, qu’elle force le comte de Salms, administrateur de Strasbourg, à lui céder par un traité, Louis XIII, qui ne déclarait point la guerre à la maison d’Autriche, la déclarait au duc de Lorraine, Charles, parce qu’il était partisan de cette maison. Le ministère de France n’osait pas encore attaquer ouvertement l’empereur et l’Espagne qui pouvaient se défendre, et tombait sur la faible Lorraine. Le duc dépossédé était Charles IV[2], prince célèbre par ses bizarreries, ses amours, ses mariages, et ses infortunes.

Les Français avaient une armée dans la Lorraine et des troupes dans l’Alsace, prêtes d’agir ouvertement contre l’empereur, et de se joindre aux Suédois à la première occasion qui pourrait justifier cette conduite.

Le duc de Féria, poursuivi par les Suédois jusqu’en Bavière, était mort après la dispersion presque entière de son armée.

Le duc de Valstein, au milieu de ces troubles et de ces malheurs,

  1. Philippe-Christophe de Sotteren ; voyez la liste des Électeurs de Trêves.
  2. Voyez tome XIV, les chapitres iii, v, vi et vii du Siècle de Louis XIV.