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CHAPITRE XI.


enthousiasme d’une paysanne du Barois, et surtout par les divisions des Anglais et de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, tout fut oublié, tout fut pacifié ; il remit son petit parlement de Poitiers à celui de Paris. Ce tribunal prit une nouvelle forme. Il y eut dans la grand’chambre trente conseillers, tous jurisconsultes, dont quinze étaient laïques et quinze ecclésiastiques. Charles en mit quarante dans la chambre des enquêtes. La chambre de la Tournelle fut instituée pour les causes criminelles ; mais cette Tournelle ne pouvait pas alors juger à mort ; il fallait, quand le crime était capital, porter la cause à la grand’chambre. Tous les officiers eurent des gages. Les plaideurs ne donnaient aux juges que quelques faibles présents d’épiceries et de bouteilles de vin. Ces épices furent bientôt un droit converti en argent, C’est ainsi que tout a changé, et ce n’a pas toujours été pour le mieux.



CHAPITRE XI.


DE L’USAGE D’ENREGISTRER LES ÉDITS AU PARLEMENT, ET DES PREMIÈRES REMONTRANCES.


La cour du parlement devint de jour en jour plus utile en n’étant composée que d’hommes versés dans les lois. Un de ses plus beaux droits était depuis longtemps l’enregistrement des édits et des ordonnances des souverains, et voici comment ce droit s’était établi.

Un conseiller du parlement, nommé Jean de Montluc, qui vivait sous Philippe le Bel, avait fait pour son usage un registre des anciens édits, des principaux jugements et des choses mémorables dont il avait eu connaissance. On en fit quelques copies. Ce recueil parut d’une très-grande utilité dans un temps d’ignorance où les coutumes du royaume n’étaient pas seulement écrites. Les rois de France avaient perdu leur chartrier ; ils sentaient la nécessité d’avoir un dépôt d’archives qu’on pût consulter aisément. La cour prit insensiblement l’usage de déposer au greffe du parlement ses édits et ses ordonnances. Cet usage devint peu à peu une formalité indispensable: mais on ne peut savoir quel fut le premier enregistrement, une grande partie des anciens