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CHEMINS.

a conservées de François Ier. Tout est perdu fors l’honneur[1] est d’un digne chevalier ; mais en voici une qui n’est ni de Cicéron, ni de César.

« Tout à steure ynsi que je me volois mettre o lit est arrivé Laval, qui m’a aporté la serteneté du lèvement du siége. »

Nous avons quelques lettres de la main de Louis XIII, qui ne sont pas mieux écrites. On n’exige pas qu’un roi écrive des lettres comme Pline, ni qu’il fasse des vers comme Virgile ; mais personne n’est dispensé de bien parler sa langue. Tout prince qui écrit comme une femme de chambre a été fort mal élevé.



CHEMINS[2].


Il n’y a pas longtemps que les nouvelles nations de l’Europe ont commencé à rendre les chemins praticables, et à leur donner quelque beauté. C’est un des grands soins des empereurs mogols et de ceux de la Chine. Mais ces princes n’ont pas approché des Romains. La voie Appienne, l’Aurélienne, la Flaminienne, l’Émilienne, la Trajane, subsistent encore. Les seuls Romains pouvaient faire de tels chemins, et seuls pouvaient les réparer.

Bergier, qui d’ailleurs a fait un livre utile[3], insiste beaucoup sur ce que Salomon employa trente mille Juifs pour couper du

  1. On attribue faussement à François Ier ce billet laconique : Madame, tout est perdu, fors l’honneur, qu’il aurait écrit à la duchesse d’Angoulême, sa mère, après la défaite de Pavie, le 24 février 1525. Voici le véritable texte de la seule lettre qu’il lui adressa. Elle est datée du 10 novembre 1525, et fut apportée de la citadelle de Pizzighitone, où il était détenu, par Nicolas Ladam, roi d’armes de Charles-Quint :

    « Pour vous advertir comment se porte le ressort de mon infortune, de toutes choses ne m’est demouré que l’honneur et la vie, qui est sauve, et sera que, en notre adversité, cette nouvelle vous fera quelque peu de réconfort.

    « J’ai prié qu’on me laissât vous escripre ces lettres, ce qu’on m’a agréablement accordé, vous suppliant ne volloir prendre l’extrémité vous-meismes, en usant de vostre accoustumée prudence : car j’ai espoir en la fin que Dieu ne m’abandonnera point ; vous recommandant vos petits-enfants et les miens ; vous suppliant faire donner leur passage pour aller, et le retour en Espagne à ce porteur qui va vers l’empereur pour savoir comme il faudra que je sois traité.

    « Et sur ce, très-humblement me recommande à votre bonne grâce.

    « Votre humble et obéissant fils,

    « François. »

  2. Questions sur l’Encyclopédie, troisième partie, 1770. (B.)
  3. L’Histoire des grands chemins de l’empire romain, 1622, in-4o, réimprimé en 1728, 2 volumes in-4o, et 1736, 2 volumes in-4o, (B.)