Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome2.djvu/326

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paux de Paris à prendre des mesures de sûreté, et on lut l’annonce suivante sur les affiches pour la première fois :

« Conformément aux ordres de la municipalité, le public est prévenu que « l’on entrera sans cannes, batons, épées, et sans aucune espèce d’armes « offensives. »

« La représentation fut extrêmement tumultueuse : le public ayant aperçu MM. de Mirabeau et de Menou, députés célèbres de l’Assemblée constituante, les couvrit d’applaudissements ; et le premier étant place aux troisièmes loges, une députation du parterre alla l’inviter à descendre aux galeries pour que chacun put le contempler à son aise.

« La toile fut à peine levée que l’on applaudit les maximes révolutionnaires avec transport. Quelques sifflets s’étant fait entendre, le parterre s’écria avec force : A bas les aristocrates ! à la porte ! à la porte ! Le moment le plus remarquable de cette représentation fut celui où l’on prononça cet hemistiche : « Vivre libre et sans roi. » Un grand silence ne fut interrompu que par quelques applaudissements honteux ; mais tout à coup les loges se leverent spontanément en s’écriant : Vive le roi ! et ce cri retentit à l’instant dans toutes les parties de la salle : les chapeaux, les mouchoirs furent agités : en un mot, l’enthousiasme public se manifesta de la manière la plus touchante.

« Après la pièce, le parterre avant demandé à voir le buste de Voltaire. tous les acteurs s’empressèrent d’aller le chercher dans le grand foyer, et l’apportèrent sur le theatre au milieu des applaudissements et des cris de Vive Voltaire ! Comme il était impossible que ce buste tint solidement sur un théâtre qui va en pente. et que le public voulait constamment l’avoir sous les yeux, deux grenadiers le soutinrent pendant tout le temps que dura la Feinte par amour, qu’on joua après Brutus. »

La deuxième représentation attira encore un concours nombreux de spectateurs. On avait placé sur chaque côté du theatre les deux bustes de Brutus et de Voltaire. Au lever de la toile un papier ayant été jeté des loges, M. Vanhove le ramassa et lut au public les deux vers suivants :

Ô buste révéré de Brutus, d’un grand homme !
Transporté dans Paris, tu n’as pas quitté Rome !

La représentation fut un peu moins bruyante que la première à la fin du cinquième acte, les acteurs mirent en action le superbe tableau de David représentant le corps de Titus porté sur un brancard par des licteurs et l’attitude sombre de Brutus immobile dans sa douleur. Cette innovation produisit un très-grand effet, et le public en témoigna sa satisfaction par de vifs applaudissements.

Le 21 mai 1791, une reprise très-remarquable de Brutus eut lieu au theatre de la rue Richelieu, où Monvel et Talma réunirent tous les suffrages dans les rôles de Brutus et de Titus.

Il est constant que Brutus fut une des pièces qui eurent le plus de succès pendant la Révolution. On lit toutefois dans le Lycée de Laharpe cette note singulière : « N’oublions pas, en finissant cet article de Brutus, de rappeler