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plus IIP sniirait se rniitciiter du moins. On sora toujours mal venu à (lii’c an public : Je a ions diniinuor votre plaisir. Si, au milieu (les tal)loan\ ûo lUibons on de Paul ^ rronôso, (luchju’iin venait placer ses dessins au crayon, n"anrait-il pas tort de sï’galer à ces peintres ? On est accoutume dans les fêtes à des danses et à des (•hauts : serait-ce assez de marcher et de parler, sons prétexte (pTou marchei’ait et (fn"on parlerait bien, et ([ue cela serait plus ais(’ et plus naturel ?

Il y a j ; rande apparence qu’il faudra toujours des vers sur tous les théâtres tragi(|ues, et, de plus, toujours des rimes sur le nôtre. C’est même à cette contrainte de la rime et à cette sévérité extrême de notre versification que nous devons ces excellents ouvrages que nous avons dans notre langue. Nous voulons que la rime ne coûte jaiuais rien aux pensées, qu’elle ne soit ni triviale ni trop recherchée ; nous exigeons rigoureusement dans un vers la même pureté, la même exactitude que dans la prose. Nous ne permettons pas la moindre licence : nous demandons qu’un auteur l^orte sans discontinuer toutes ces chaînes, et cependant qu’il paraisse toujours lihre ; et nous ne reconnaissons pour poêles que ceux qui ont rempli toutes ces conditions.

Exemple de la dif/icultc des vers français.

Voilà pounpioi il est plus aisé de faire cent vers en toute autre langue ([ue ({uatre vers en français. L’exemple de notre abbé Régnier Desmarais, de l’Académie française et de celle de la Crusca, en est une preuve hien évidente : il traduisit Anacréon en italien avec succès, et ses vers français sont, à l’exception de deux ou trois quatrains, au rang des plus médiocres. Notre Ménage était dans le même cas. Combien de nos beaux esprits ont fait de très- beaux vers latins, et n’ont pu être supportables en leur langue !

La rime plait aux Français, même dans les comédies.

Je sais combien de disputes j’ai essuyées sur notre versifica- tion en Angleterre, et quels reproches me fait souvent le savant évêque de Rochester^ sur cette contrainte puérile, qu’il prétend

1. Atterbury (François), né en 166-2, évêque de Rochester en 1713, banni d’An- gleterre en 1723, mourut à Paris le 15 février 1732. Cliaufepié |J.-G. ; , qui a publié à Amsterdam Attefbury’s epistolary Correspondence, avait parlé assez longuement